"La Bible affirme que le paradis est un lieu où il n'y a pas la mer. Ses auteurs ne connaissent pas le golfe du Morbihan, une exquise petite mer de famille blottie dans un creux de la Riviera bretonne: 12500 hectares d'eau paisible que lèchent des pages de sable blond, des prairies verdoyantes et des bouquets d'arbres frôlés par les mâts de voiliers flânant en pleine béatitude.
Bien sur, ce n'est pas la haute mer. On a quitté l'océan, la longue houle s'est dissoute, les vagues restent sages, le bruit du vent s'estompe, les sternes batifolent, les bernaches virent sans rime ni raison...
Après les tambours et les basses du grand large, place à une sorte de musique de chambre.
Quand vous vous glissez dans le golfe du Morbihan, vous pénétrez un monde à part où la terre et la mer s'entortillent et où les îles se prélassent au soleil, offertes de tout leur long aux chatteries d'un air tiède et d'une marée caressante. Ici, même la mer est fleurie. Car, comme il y a des jardins anglais ou japonais et les jardins à la française, il y a le jardin nautique à la bretonne. Non seulement éparpillées comme des pièces de puzzle sur un tapis bleu, les îles sont noyées de camélias, d'hortensias, de roses, de genêts, de" bruyères et de fleurs d'ajonc mais les rivages ont l'air d'un bouquet de salicornes, de lavande de mer et de toute la végétation aquatique qui éclaire les marais, les baies, les anses et les et les étangs qui se succèdent."
Gilles Martin-Chauffier
Peut-être même qu'il faut se cacher pour embarquer,
se dissimuler derrière les feuilles comme un soldat en opération,
si ce n'est que ce fantassin là s'habillerait de paisible et d'un peu de lyrisme.
Il faut trouver son chemin jusqu'à la cale et se promettre, comme à chaque fois, que bien sur, on reviendra jusqu'à... plus soif...de la vie.
"Une goutte est la mer
un éclat tout le soleil
Le jour est tout le jour
pour qui avance
le corps léger
Les pas renouent
les fils du paysage
en quête de pierres
et de lumières oubliées
Les prés se donnent
comme autrefois
le velours d’une robe
Du plus loin
ou du plus proche
l’œil remonte
à la source."
Marilyse Leroux
"Une fleur t'appelle
dans le jardin de solitude
Tu te penches sur elle
et donnes tes yeux
à la couleur de l'instant
Tu la pares d'un nom
plus doux que la douceur
afin de préserver
cet espace entre vous
Tu te penches sur elle
elle avale ton ombre
et s'ouvre à ta pensée"
Marilyse Leroux
"Tu entres
au coeur de l'espace
comme dans un nid
où tu poserais les ailes
Un duvet de rose
à tes pieds
pour te consoler
du poids de la terre
Et toujours
autour de toi
cette douceur de l'air
qui te dit
que toute chose
est habitable
ici-bas."
""Ce
ne sont que 53 kilomètres de bitume, mais ils sèment la discorde en
Occitanie. Ce chantier d’une nouvelle autoroute, l’A69, reliant Castres
et Toulouse, dans les cartons depuis plus de quarante ans, a débuté le
6 mars, réveillant la colère de militants écologistes qui rappelle les
oppositions, parfois violentes, exprimées contre les mégabassines de Sainte-Soline (Deux-Sèvres).
Il
est vrai que la construction de nouvelles autoroutes a de quoi
surprendre, à l’heure où le président de la République ne cesse
d’exhorter à la sobriété énergétique et alors que les Français semblent
avoir intégré l’importance de la décarbonation de leur quotidien. Si
tous les projets autoroutiers sont désormais pour le moins discutables,
le cas de l’A69 est symbolique, car la future 2x2 voies doit s’établir… à
quelques dizaines de mètres d’une nationale, loin d’être saturée, et
suivant quasiment le même tracé !
Selon les défenseurs du
projet, l’A69 devrait faire gagner environ vingt-cinq minutes aux
automobilistes, sur un trajet de plus d’une heure. Un gain de maximum
quinze minutes, contestent les opposants, qui pointent en outre le coût du péage
(plus de 8 euros). L’A69 est-elle un anachronisme écologique, ou une
solution pour désenclaver un territoire rural, le sud du Tarn, et doper
l’économie locale, comme le martèlent les élus locaux, dont la
présidente (PS) d’Occitanie, Carole Delga (qui n’a pas souhaité répondre
à « l’Obs ») ? Le promoteur insiste pour sa part sur les mesures
écologiques d’accompagnement et souligne surtout que le projet a été
érigé en « priorité nationale » par celle qui n’était pas encore Première ministre, une certaine… Elisabeth Borne.
Aurélien
Bigo, chercheur sur la transition énergétique des transports, opposé à
l’A69, nous éclaire sur les enjeux de la contestation.
Pourquoi vous opposez-vous à la construction de l’autoroute A69 reliant Castres à Toulouse ?
Comme
tous les projets d’autoroutes encore dans les cartons, celui-ci va
totalement à contresens des exigences de transition écologique et
énergétique de la France et, même, à contresens des objectifs que l’Etat
s’est fixés et pour lesquels nous sommes particulièrement en retard.
C’est comme construire de nouvelles centrales à charbon !
Pour
parvenir à atteindre les objectifs actés dans la loi, en particulier le
zéro carbone et le zéro artificialisation des sols, il est nécessaire de
s’appuyer sur deux piliers : le développement de nouvelles technologies
et un effort de sobriété énergétique. Nous avançons certes sur le
premier, mais le deuxième semble totalement ignoré, comme le prouve ce
genre de projet.
Mais l’A69 ne vient-elle pas combler un besoin ?
D’abord,
ce projet, comme la plupart de ceux encore sur la table, date de
plusieurs décennies ! Ce sont des projets du passé, qui n’ont pas été
réévalués à l’aune du contexte écologique actuel. Ensuite, une nouvelle
autoroute a toujours des effets à la hausse en termes de déplacements,
donc de dépenses d’énergies. Les défenseurs des projets autoroutiers
affirment généralement que l’autoroute va fluidifier le trafic, sans
l’augmenter et donc réduire les embouteillages et la pollution induite.
Mais c’est faux. Comme le trajet sera plus rapide, davantage de
personnes seront tentées de l’emprunter (pour un nouveau job, des
activités de loisirs, etc.) et ceux qui faisaient déjà la route feront
peut-être plus de distance dans leur journée, puisqu’ils gagneront du
temps sur ce trajet : on appelle ce phénomène « l’induction de trafic ».
C’est,
d’ailleurs, l’objectif des élus locaux qui espèrent, comme toujours,
que l’autoroute va booster l’économie et les échanges entre ces villes :
donc plus de transport de marchandises (en camions…) et de
travailleurs, en voitures. Alors qu’il faudrait justement, dans le monde
de demain, devenir plus sobres dans nos déplacements, en réduisant les
distances des trajets domicile-travail. Il faut pour cela développer
l’économie localement, pas encourager les Français à plus de
déplacements…
Le simple fait que ce type de projet existe encore,
soutenu par un large spectre politique, prouve que les transitions
écologique et énergétique ne sont tout simplement pas prises au sérieux.
C’est aussi une histoire de coût…
Oui, tous ces projets sont coûteux [le
coût des 50 kilomètres de l’A69 est actuellement estimé à 500 millions
d’euros, dont près de 25 millions d’argent public, NDLR] à l’heure
où nous aurions besoin de cet argent pour la transition : le
ferroviaire, les infrastructures pour les vélos, mais aussi pour
financer l’accompagnement social de cette transition, en soutenant
financièrement ceux qui, par exemple, n’ont pas les moyens de s’acheter
un véhicule électrique.
Le promoteur privé de l’A69 affirme pourtant qu’il s’agit d’une autoroute « nouvelle génération », avec de nombreuses mesures écologiques…
C’est
un discours que tiennent la plupart des promoteurs de chantiers
autoroutiers : ils se sentent obligés, aujourd’hui, de les repeindre en
vert, avec des mesurettes écologiques. C’est essentiellement de la com !
Une autoroute « verte », c’est évidemment factuellement faux ! Les
effets sont connus, documentés…
Qu’est-ce qui fait qu’un projet peut être qualifié d’écologique ?
Pour le savoir, c’est simple : correspond-il aux cinq impératifs de décarbonation de la Stratégie nationale bas-carbone [scénario officiellement promu par l’Etat français depuis 2015] ?
Modérer la demande, favoriser un report vers des transports moins
polluants que l’automobile, optimiser le remplissage des véhicules [transports en commun ou covoiturage…],
promouvoir une meilleure efficacité énergétique, c’est-à-dire réduire
la dépense énergétique par kilomètre, et réduire l’intensité carbone de
l’énergie, grâce par exemple à l’électrification des véhicules. Sur
trois de ces cinq leviers, une nouvelle autoroute va totalement à
contresens.
Lesquels ?
D’abord, elle ne modérera pas du tout la demande, au contraire, comme
je le disais. Elle ne favorisera pas, non plus, un report sur d’autres
modes de déplacement plus vertueux : plus d’autoroutes, ce sont plus de
voitures et de camions ! Les cars, mis en avant par les promoteurs de
ces projets, ne représentent systématiquement qu’une goutte d’eau du
trafic. Enfin, elle ne favorise pas l’efficacité énergétique, car, à
distance égale, un automobiliste consomme plus d’énergie sur une
autoroute à 130 km/h que sur une nationale à 80-90 km/h !
Restent le remplissage et l’électrification…
Les
promoteurs ont beau jeu d’insister sur ces points, à coups de parking
de covoiturage ou de bornes électriques. Mais c’est minime, et surtout
il n’y a pas besoin de nouvelles autoroutes pour agir sur ces leviers.
Actuellement, les véhicules électriques ne représentent par exemple que
2 % du parc de voitures… On nous dit qu’à l’horizon 2050, 97 % des
véhicules seront électriques, mais ce n’est qu’une projection, pas une
réalité tangible. Et pendant de longues années, ce seront encore
majoritairement des véhicules thermiques et polluants qui emprunteront
cette autoroute…
Et quand bien même nous aurions, demain, 100 % de
véhicules électriques, les autoroutes restent un mauvais signal. Car
des voies à plus faible vitesse, comme les nationales, c’est une
consommation plus faible, donc plus d’autonomie pour les véhicules
électriques ! A l’inverse, être dépendants de déplacements sur
autoroutes, qui favorisent une augmentation des distances parcourues, va
nécessiter des batteries plus grosses ! Or, tout le monde sait que la
fabrication des batteries est la part la plus polluante des véhicules
électriques.
Mais pourquoi les autorités s’entêtent-elles ?
Les
politiques manquent de courage pour engager réellement la transition
écologique et énergétique, qui exige, évidemment, de renoncer à ces
projets devenus anachroniques.
Mais ils sont tiraillés entre
différents enjeux, et l’écologie n’arrive que très rarement en tête des
priorités… Leur vision de l’aménagement du territoire est datée,
reposant uniquement sur l’accélération des déplacements, alors qu’il
faudrait insister sur la réduction des distances parcourues.
Ils
craignent, enfin, de se désengager de projets qu’ils ont soutenus
pendant des décennies, de peur d’être accusés de faire volte-face. C’est
pourtant ce qui s’est passé à Rouen, où le maire socialiste [Nicolas Mayer-Rossignol]
a changé de position sur le contournement autoroutier de la ville, en
faveur duquel il avait milité par le passé. C’est une démarche à saluer.
Les
autorités avancent aussi le résultat d’un sondage qui affirme que 75 %
des « populations concernées » sont favorables au projet…
Il m’est
difficile de commenter ce chiffre en particulier, contesté par les
opposants locaux. Mais il est symptomatique d’une forme de dissonance
cognitive de chacun, un « conflit d’objectifs », entre nos
préoccupations écologistes – toujours une préoccupation majeure des
Français –, et un bénéfice individuel, presque égoïste, de quelques
minutes de gagnées sur un trajet… Psychologiquement, pour répondre à
cette incohérence, soit l’on arrête ces projets autoroutiers polluants,
soit on entre dans le déni et on se rassure en se disant que « ce ne
sont pas 50 kilomètres d’autoroute qui vont changer quoi que ce soit
pour la planète »… Une erreur, évidemment, dès qu’on multiplie ce genre
de raisonnement à toutes les transformations qui seraient nécessaires.
Les opposants à l’A69 proposent d’agrandir la nationale existante. Est-ce une bonne alternative ?
S’il
s’agit d’élargir la nationale pour pouvoir ajouter des pistes cyclables
protégées, pourquoi pas ? Mais si c’est pour créer une autoroute à la
place de la nationale, encore une fois, cela ne va pas dans le bon sens.
La
majorité, par la voix du ministre de l’Intérieur, qualifie les
opposants de membres de l’ultragauche, voire « d’écoterroristes »…
C’est
un glissement sémantique très inquiétant pour qualifier des militants
dont l’objectif est seulement de protéger notre vie sur terre ! Ces
personnes se contentent de rappeler les objectifs que l’Etat s’est
lui-même fixés…
Arrêter de construire de nouvelles
autoroutes est, selon vous, une évidence, mais que faire des 11 000
kilomètres d’autoroutes existants ?
La mesure écologique la plus
facile est de baisser la vitesse sur ces voies à 110 km/h, car cela
réduirait significativement la consommation énergétique, sans pour
autant allonger lourdement la durée des trajets. Il faudrait ensuite y
développer, autant que faire se peut, les voies dédiées au covoiturage
et aux transports en commun. Nous pourrions même transformer certaines
infrastructures existantes, et notamment les autoroutes urbaines, pour
en changer l’usage, comme Paris réfléchit à le faire pour le
périphérique ou comme cela se fait de plus en plus dans les grandes
villes d’Europe ou du monde.
Que pensez-vous des projets de nouvelles lignes ferroviaires, qui sont souvent aussi contestés localement ?
Soyons
clairs : le train est toujours préférable aux voitures et aux camions !
Néanmoins, la question de ces nouveaux projets mérite malgré tout
d’être posée. Il ne faut pas seulement faire plus de trains pour réduire
les émissions : il faut surtout faire moins de voitures et de camions !
Mais le problème est qu’historiquement, il n’y a pas eu de fort report
modal de la route vers le train au niveau global.
Lors de la
création d’une offre de train supplémentaire, il faut donc s’assurer que
son usage se fasse autant que possible en remplacement de la voiture
et/ou de l’avion, avec, notamment, suffisamment de trains par jour !
Sinon, on ne fait qu’augmenter les distances parcourues de tous les
modes de transport, y compris les plus émetteurs. Et c’est dans la
direction opposée qu’il faut aller."