lundi 30 mai 2022

tangage

"Certains ne deviennent jamais fous...
Leurs vies doit être bien ennuyeuses."
Charles Bukowski
 
J'imaginais le piment de la vie_même pas vrai- J'imaginais devant derrière et tous les autres côtés aussi. J'imaginais une musique pour chaque chose et chaque chose en musique. J'imaginais des mots à rebours pour enfin se comprendre. J'imaginais l'inimaginable, il existe. J'imaginais le fil des aiguilles
d'une horloge patraque. J'imaginais me taire. J'imaginais le mal de mère. j'imaginais l'ex père. J'imaginais le propre mal figuré.

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FLEE à voir Ici ou
 

 L'histoire d'Amin par Jonas Poher Rasmussen


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 "
À la table de qui le Juste refuserait-Il de s'asseoir
S'il s'agit d'aider la justice ?
Quel remède paraîtrait trop amer
Au mourant ?
Quelle bassesse refuserais-tu de commettre
Pour extirper toute bassesse ?
Si tu pouvais enfin transformer le monde,
que n'accepterais-tu de faire ?
Qui es-tu ?
Enfonce-toi dans la fange,
Embrasse le bourreau, mais
Change le monde : il en a besoin !"
 Bertold Brecht 
 

"
Et si l'inutilité, la gratuité, le don, l'insouciance, le plaisir, la recherche désintéressée, la poésie, la création hasardeuse engendraient de la valeur ? Et si les marchands dépendaient - ô combien ! - des poètes ? Et si la fourmi n'était rien sans la cigale ? Voici venu le temps d'affirmer, contre les économistes, que l'inutile crée de l'utilité, que la gratuité crée de la richesse, que l'intérêt ne peut exister sans le désintéressement." 
Bernard Maris 
 

 
 
                               
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 organisé par "L'écrit parle"

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             "Cependant, j'étais loin d'être désespéré. Je ne le suis même pas devenu aujourd'hui. Je me donne seulement des airs.
Le plus grand effort de ma vie a toujours été de parvenir à désespérer complètement. Il y a toujours quelque chose en moi qui continue à sourire."
Romain Gary   
 

                    

                                            

samedi 28 mai 2022

depuis le temps

 

Depuis le temps
 et par tous les temps, cherchant  chaussure
à son pied
le Doughboy amphibie
                                    du boulevard Joël Guy. 
Depuis le temps qu'il ramait dans la vase de l'estuaire
à larguer sa mer
                             le Sammie fraie dans  l'eau...
Depuis le temps posé là,
vigie pirate des atlantiques,
narguant les marées et les enlisés 
en sable, émouvants;
Depuis le temps,
toréador de western,
                               picador à moules,
GI joe de la reconstruction:
on démolit tout, on recommence
et c'est pas triste...
 




 "L'être humain parle ; parfois, il ne parle pas.
Menacé il se contracte, ses regards fouillent rapidement l'espace; 
désespéré il se replie, s'enroule sur un centre d'angoisse.
Heureux, sa respiration se ralentit; il existe sur un rythme plus ample."
Michel Houellebecq extrait de: "Rester vivant et autres textes" Librio
 
 
 Coeurs à la renverse
                      Clitoris prenant l'air du large
Image pour musard aimant le figuré au propre
                                 Conjuration du sort
 Art thérapie
                   Wikipédia de l'embouchure.
 
 

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PROGRAMME

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 "Ce n'est que par instinct que nous faisons mille mouvements involontaires, de même que c'est par instinct que nous somme curieux, que nous courons après la nouveauté, que la menace nous effraie, que le mépris nous irrite, que l'air soumis nous apaise, que les pleurs nous attendrissent."
Voltaire extrait de: "Questions sur l'Encyclopédie"
 
 

mardi 24 mai 2022

il serait bon

 

 Il serait bon de stopper vos enfantillages printaniers.
Ce n'est pas un ordre, bien sur,
juste un conseil entre-nous, puisque vous m'avez rendu visite au sortir du nid
et que ma position statuaire m'oblige à vous suggérer quelques aménagements;
si naturellement vous aviez l'intention de durer le temps qu'il faudra.
La vie est  bien compliquée et si vous ne vous décidez pas à battre des ailes et tenter un décollage
vers d'autres destins, vous risquez fort de limiter cruellement et drastiquement votre fragile existence.
Parole de bout d'A.
 

" Dans le fond, les vrais révoltés ne veulent pas changer le monde. Je suis pour toutes les révolutions et contre leur résultat. Je rêve de révolutions suspendues."
 Marc-Edouard Nabe
 
Over the rainbow
 

 "Ce n'est pas ce que l'on dit qui compte mais ce qu'on entend."
Philippe Delerm 
 

 

      Entrez c'est tout vert.
 
  Déjeuner au jardin,
                                      à la bonne cueillette 
            six pieds sur terre,
                                              en cultivant les ptits bonheurs.
 

"Attraper un crayon, un bic, un marqueur.
Tout fera l'affaire!
Sortir calepin, cahier, carnet.
Déchirer.
Bout de nappe.
Bout de carton. Ecrire. Jeter.
Bout de texte. Bout de phrase.
Beauté des patchworks.
Beauté des mosaïques.
Gribouillages frénétiques.
Peur de perdre les images.
Peur de perdre les échos.
Geste. Robot.
Ne pas perdre.
Ne pas. Ne pas.
Ecrire. Ecrire.
Putains de points, putains de virgules.
Faire sauter. Faire. Faire. Faire sauter.
Ecrire. Ecrire.
Accumulation gloutonne.
Matière. Matière.
Terreau.  
                                        -Ne jamais jeter de terreau à la poubelle-
Liste des synonymes, liste des contraires,
listes de mots qui riment, liste de termes en argot,
listes de mythes, liste de monstres,
liste des objets que l'on peut perdre dans le fond
des océans,
traduction en différentes langues
de cette liste d'objets que l'on peut perdre dans le fond 
des océans,
liste des morts qui remontent à la surface des mémoires et qui demandent justice.
Noircir, noircir.
vin blanc.
Ce n'est plus une histoire avec un début et une fin.
Ce n'est pas encore un poème.
Vin blanc.
Ecrire, écrire.
Et quand ça grippe,
quand ça ralentit,
quand ça rementalise,
changer de support.
Papier kraft, papier calque.
Changer de format.
Changer la taille des lettres.
Changer, épaisseur des mines.
Changer, couleur des encres.
Vin blanc.
Ecrire, écrire.
Ratures, annotations, flèches.
vin blanc.
Grance récolte.
vin blanc.
Grande récolte de mots."
Lisette Lombé "C'est le temps du vin blanc"

 

 
 

 […] la vie me paraît aussi trépidante que ses dimanches. Comme me le fit remarquer cet ami qui a le sens de la formule : « Tu sembles traverser les jours dans le sens de la langueur ». 
Frédéric Schiffer extrait de: "Sur le blabla et le chichi des philosophes."
 
 

samedi 21 mai 2022

just a perfect day

 
toit! toit! mon toit
 
 
 "L'homme en pantalon de treillis s'est fait tuer son chien par une voiture. il l'a retrouvé sur le bord de la route. Il a pleuré. Le soir de l'accident, il a dormi avec son chien mort dans les bras. Emballé dans du plastique. il a pleuré encore.
Tout n'est pas vraiment triste. c'est étrange, doux et mystérieux. Il a pleuré suffisamment fort pour que cela nous marque durablement. Et puis il a repris un chien. Un jeune chiot. Noir. Avec du blanc pour sur le poitrail. Des pattes courtes. de longues griffes neuves. Des grandes oreilles pendantes, les yeux surpris. Le petit chien dort sous le tabouret du bar. Deux cent cinquante grammes de sommeil, allongés sur le carrelage frais. Et des pieds, tout autour de lui. Sur deux rangs. Les mecs boivent. Le chien se sent bien. Personne ne marche sur les pattes allongées du petit chien. A droite, des pieds nus. Le buveur a enlevé ses chaussures. Il est souvent pieds nus. Dans la rue. Dans les bars. il boit du vin blanc. il ne marchera pas sur le chien avec ses pieds nus. Ces pieds nus rassurent le chien. Cet homme est un homme qui aime marcher dans les rues pieds nus, et ce chien est un chien endormi sur le sol frais. a ce moment de sommeil du chien et de douceur des pieds nus, les choses sont claires, précises. Visibles. Pures.
Et puis sur la gauche s'ajoute à l'image la puissance d'une paire de chaussures lourdes. Des pompes de sécurité. Ensuite, tout près de cette masse de cuir épais griffé, les chaussures crème légères d'une dame. Elle a posé un pied sur l'autre. Des pieds l'un sur l'autre qu'aurait aimé caresser Calaferte.
Venez boire avec nous monsieur Calaferte! Ils boivent. Ils parlent. Le chien rêve. Il agite ses pattes. il court. il vole, peut-être. Le chiens font des rêves de vol et les oiseaux font-ils des rêves de promenade à pied?
Un jour, peut-être, le comptoir nous le dira. Revenez boire avec nous Bohumil Hrabal. Une bière?
un buveur parlera du rêve des chiens et de celui des oiseaux. Ce sera inattendu. il faut être là. au bout du comptoir, ce jour où l'assoiffé parera du rêve des chiens. il n'y a rien d'autre à faite qu'être là. Assister à ce petit moment révolutionnaire. Quand l'homme un peu saoul explique le rêve des chiens. Il ne se passe rien. Venez boire avec nous monsieur Primo Levi...Le pouvez-vous?
Venez vous saouler avec nous! Les jambes de la dame sont jolies. La peau n'est pas douce. La peau a longé les comptoirs de bois, combien de fois, combien de bois?
Venez boire avec nous, Chritie Gun, et votre petit frangin noyé, venez picoler avec nous Erri De Luca, tranquille, venez écouter parler ce jeune maçon, le facteur, le routier, le couple de chômeurs...
Le chien respire doucement, il tend ses pattes avant, comme s'il repoussait quelque chose, quoi? 
Venez regarder le chien qui dort au pied du comptoir, aux pieds des gens, avec nous, reviens boire un verre, Sagan, ça serait joli, on déconne, installe-toi, douce, fragile, cassée, douloureuse, entre le vieux pêcheur et la petite coiffeuse, ça y est, ils parlent maintenant des orages, des nuages de grêle qui se développent en hautes colonnes blanches, grises à la base, grises au sommet, ce poème permanent, cette connerie parfois, cet amour, cette fraternité, viens boire avec nous Agota Kristof...
.../..."
 
".../...
Le chien a tremblé un peu, les mots sur l'orage, les mots sur la guerre, les mots sur les morts en Chine...Un jeune homme en bermuda blanc parle de marmottes, tous ces mots flottent et tombent sur le chien. On voit là-haut les bras qui s'agitent et font un petit vent. On aperçoit des mains qui frôlent le bord du zinc. Grands papiers qui volent dans l'air du bar. Les épaules qui se touchent. et les heures qui passent. Virginia Woolf approche. Elle entend les voix. Elle boit. Elle tombe près du chien. Le visage de Virginia Woolf contre le museau du chien qui dort. Elle saigne un peu du nez. Un monsieur entre. il marche sur Virginia Woolf. Le chien soupire. L'homme s'installe à gauche de la dame aux mollets jolis. Il est nerveux. Un acide. Après avoir commandé sa bière, il dit que ça ne peut pas durer comme ça et que de toute façon la terre va s'arrêter. Déjà qu'on sait pas l'heure, dit l'autre, si en plus la terre s'arrête! La femme sourit. L'acide sourit. La patronne se tourne. A la radio, loin, c'est Lou Reed. Le comptoir est tiède. La main de la dame glisse sur le métal. Un verre tombe et se brise. Le chien sursaute et remue la queue. Puis repose la tête sur le carrelage frais. Le verre tombé donne du vent à la conversation, les pales se mettent à tourner, comment les choses se cassent? Comment les choses ne se cassent pas? Les assiettes. Les jambes. Les projets. Les envies. Les amours. Les biscottes.
Virginia Woolf disparaît dans le carrelage. Elle disparaît dans le chien. Qu'est-ce que tu bois? C'est le nouveau rentré qui parle. L'homme à sa droite, dit: pareil! Il boit pareil. Une minute et un pareil. Une heure et un pareil. Une vie et un pareil. Dans le même verre. Le pareil et la vie comme deux alcools. Le vin fait son travail. Les buveurs maintenant ont envie de rire. Depuis quelques jours il fait beau, il fait chaud. Les joues brillent. Les yeux brillent. La pointe aussi des dents du chien lance des éclats. De minuscules étincelles blanches entre ses babines retroussées. La langue pendante. Il respire vite. ses rêves de vol dans les nuages l'ont essoufflé. A-t-il coursé les anges? bondi sur eux, à travers les feuillages de grêle? Leur a-t-il mordu le cul? Les anges ont les fesses lisses et rebondies, glabres de plumes, des fesses à chien. chez les facteurs, ce sont les mollets que les chiens aiment. Les facteurs n'ont pas les fesses rebondies des anges. Par contre, la casquette des facteurs est plus jolie. Il a quelques lettres posées près de lui, ce ne sont pas vraiment des lettres, disons qu'on ne peut pas savoir ce qu'il transporte, c'est un facteur. Il porte des factures. Des objets. il porte des fois ce que les gens disent à d'autres gens. Nantes. Cassis. Strasbourg. Biarritz.
et puis, épaule contre épaule. La bille de verre. Le chien dort. Comme un centre de la bille de verre. Le comptoir chavire. L'homme aux pieds nus balance d'avant en arrière. Le bar bouge. Le comptoir bouge. Ce n'est pas une idée inventée par ceux qui boivent, qui sont là, qui attendent, ce n'est pas une idée des anges qui chercheraient à se venger des crocs du chien dans les fesses. C'est un balancement; Lent. Sur la respiration du petit chien. Dans la bille en verre. Ce qui est dans un livre est contenu dans la bille en verre d'un gamin. il l'a dans sa poche. Son père le prend par la main. le gamin suit son père qui va au café. Le gamin serre la bille en verre. Un calot. Qu'il fait tourner. Qu'il fait chauffer dans le fond de sa poche. Un calot en verre. Avec des traverses colorées. Des tours. Des chemins qui font dormir le chien couché dans la bille. Ceux qui boivent dans la bille. Ceux qui attendent dans la bille. Le père continue sa marche vers le café, le gamin s'arrête. il se met à genoux. Prend sa bille qu'il a dans la poche. Le soleil tape sur le comptoir. Le monde à l'intérieur de la bille change un peu de couleur; ça va rouler. Le chien, toujours, sommeille. La dame jolie lève son verre. Elle a les lèvres maquillées. L'acide sourit, comme il sait le faire, quand il sait que son sourire est beau. Le gamin lance la bille qui roule dans le caniveau, le long du trottoir, vers le bas de la rue. Personne, dans la bille, ne bouge plus. Pas plus qu'avant. ils chavirent;
Un peu. l'enfant n'a pas réveillé le chien.
Je retourne dans la bille. Je bois. Tu bois. Il voit. Nous espérons. Vous embrassez. Ils boivent. Ils parlent. J'espère. Je rentre chez moi. Je pose mon coude sur le comptoir. Je bois. Tu bois. Il voit."
Jean-Marie Gourio  extrait de: "Les nouvelles brèves de comptoir"-tome 1
 


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                            Demandons le PROGRAMME
 
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 "Les elles du vent" en concert ce samedi à l
a FRAT (Sant Nazer) à 19h
 

"
Haïssez celui qui n’est pas de votre race
Haïssez celui qui n’a pas votre foi
Haïssez celui qui n’est pas de votre rang social
Haïssez, haïssez, vous serez haï.
De la haine, on passera à la croisade,
Vous tuerez ou vous serez tué
Quoi qu’il en soit, vous serez les victimes de votre haine
La loi est ainsi :
Vous ne pouvez être heureux seul
Si l’autre n’est pas heureux, vous ne le serez pas non plus,
Si l’autre n’a pas d’avenir, vous n’en aurez pas non plus,
Si l’autre vit d’amertume, vous en vivrez aussi,
Si l’autre est sans amour, vous le serez aussi.
Le monde est nous tous, ou rien.
L’abri de votre égoïsme est sans effet dans l’éternité.
Si l’autre n’existe pas, vous n’existez pas non plus."
Louis Calaferte 
 

 

"Tous les inquisiteurs du monde brûlent vainement les livres : quand ces livres ont consigné quelque chose de valable, on entend encore leur rire silencieux au milieu des flammes, parce qu'un vrai livre renvoie toujours ailleurs, hors de lui-même. "
Bohumil Hrabal
 

 

mardi 17 mai 2022

c'est par là la mer

 
Comment va le monde?
 
 Les corps s'agitent
                                      mais  heureusement l'esprit veille.
 

        Ode à la pluie par temps de sécheresse?
 

Premiers lotissements ayant servi d'éclaireurs
aux tribus suivantes
des Phénix,
Bouygue
                    et diverses compagnies.

On dit que le temps fait bien les choses
...


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 illustration source: KEDISTAN

"Le noir profond de la nuit se réfugia dans la poitrine du matin. Dans l’étable, les yeux de Dappir et de Derman brisèrent l’obscurité. Ces deux regards accablés commencèrent à se ronger l’un l’autre, petit-à-petit. Derman, de ses yeux éreintés, exténués, regarda Dappir, “tu l’as étouffé… étouffé…” dit-elle. Puis elle pleura des rivières.

Les mains de Dappir sanglotaient, suaient, tremblaient, elles cherchaient où se tapir sous ses mamelles. Un lit où elles dormiraient jusqu’à l’éternité. “Il est mort-né, l’enfant” dit Dappir, en baissant les yeux. Puis elle se tut…

Dappir dissimula Derman encore deux jours, sous les tas d’herbes, dans l’étable. Elle lui apporta du lait chaud, lui cuit des mûres grasses séchées, mais, peu importe tout ce qu’elle fit, Derman ne porta rien à sa bouche. Elle but juste de l’eau, elle but comme si l’eau lavait la douleur, éteignait le feu en son for intérieur, juste de l’eau…

Memo était un homme croyant. C’était un homme qui avait fait des voeux aux immenses montagnes, prié l’eau, l’arbre, le soleil, et versé tant de larmes. “Pauvre de moi, maintenant, il faut que le maître de cette terre et du ciel me montre le chemin”.

Memo se réveilla cette nuit là trempé de sueurs. Il avait fait un rêve. Dans ce rêve, Derman était morte ! Sous un arbre saint il y avait juste Memo, et la dépouille de Derman. Comme eau, il n’y avait même pas une goutte de rosée. Sa fille était nue, et Memo la lavait de ses larmes.

Il se leva et ouvrit ses mains vers le soleil sur le point de se lever, il fit d’abord le voeux du bien pour tous, puis une place pour lui, dans un coin. Ensuite, il réunit tous ses enfants et sa femme, autour du poêle en tôle qui feuilletait en étincelles. Désormais, personne ne devrait dire à Derman un seul mot plus lourd qu’une rose. Que le dieu ne montre la douleur de la perte d’un enfant, mieux vaudrait qu’il prenne sa propre vie. Ils allaient manger sous ce toit et se débrouiller, quelle que fût leur fortune. Ils verraient ce qui était écrit sur leur front…

D’un ordre de commandement, il envoya sa femme vers Dappir. Sa fille était trop précieuse pour être proie d’un “voyou blond”, il ne l’avait pas élevée dans la pauvreté pour rien…

Dappir, mains sur la poitrine, accueillit la mère de Derman. Comme si les montagnes s’étaient écroulées et que Dappir était restée  dessous. Elle déversa toute la souffrance de ses mains sur la mère, elle raconta tout par le menu. Comment elle avait fait, elle ne comprenait pas non plus, qui voudrait bien épouser Derman avec un bâtard… C’était arrivé d’un coup, voilà, d’un coup…

Elles s’enlacèrent et, ensemble, pleurèrent des millénaires sur leur sort.

Sur ces terres, s’il y a un père derrière une femme, s’il est solide comme une montagne, inébranlable, elle ne se laisse pas abattre facilement. Elle ne devient pas caillou, poussière, fumée, elle ne se donne pas la mort. Derman rentra à la maison avec sa souffrance. Elle s’enferma sur elle-même. “Eh, ouais, non”. Elle bâtit avec ces trois mots un tombeau au plus profond d’elle, elle y tint la garde jour et nuit, elle se donna aux tâches ménagères.

Des tempêtes éclatèrent, des pluies tombèrent, les neiges de montagnes immenses fondirent, et remplirent les ruisseaux.

La mère Terre appela le printemps, avec toute ses splendeurs. Grâce à cela, Derman se ressaisit au moins un peu. Elle avait enseigné tout ce qu’elle savait, le temps ferait le reste.

Derman était une plaie devant les yeux de Dappir, une plaie qui sans cesse, avec une pierre, rossait ses mains. Cela ne pouvait continuer comme ça, ce n’était plus possible. Un matin elle se réveilla avec les coqs. Elle se jeta sur les sentiers montagnards et disparut bientôt des regards. Elle arriva, dans un hameau, allez savoir combien de villages plus loin, chez le berger Cafer, son kirve1. Il y a trois ans, Cafer avait perdu sa femme, d’une pneumonie. Elle avait laissé derrière elle quatre orphelins.

Dappir prit Cafer en face d’elle. Elle raconta Derman, et tout ce qui s’était passé: “Derman est blessée, elle est jeune, candide, si tu panses sa plaie, si tu la soignes et la guéris, elle serait pour toi une bonne épouse, un bonne belle-mère pour tes enfants. Vas donc la chercher, prends la, et sauve Derman, sauve toi, et moi-même, au nom de la confession…”

Ensuite, elle sortit de sa poche cousue sur sa ceinture, une pièce d’or, et la laissa dans les mains cornées comme de la pierre de Cafer. “C’était la pièce pour mon linceul, tu la donneras à la mère de la fille, comme son droit au lait. Allez, et que je puisse être en paix” dit-elle, et repartit vers sa maison, le tombeau de ses mains.

Ce que Cafer espérait était un oeil, Dappir lui en proposait deux. Il déferla comme une déluge, Cafer, et en un clin d’oeil fut à la porte de Memo. Il lui demanda Derman, avec la bénédiction d’Allah, comme épouse. La pièce d’or de linceul de Dappir rejoint alors les perles, au cou de la mère de Derman, telle une grande soeur.

Derman ne voulut ni henné, ni noces. Elle ne demanda ni qui est Cafer, quel genre d’homme il est, ni ne le regarda. Quelques jours plus tard, ils partirent, Cafer devant, Derman derrière, et s’évanouirent sur les sentiers de la montagne.

Cafer se comporta toujours bien envers Derman. Et, avec le temps, Derman apprécia Cafer. Elle ne revint plus jamais à son village, jusqu’à la mort de son père Memo. Pendant de longues années elle n’eut d’enfant, puis ils eurent une fille, et un garçon.

Les mains de Dappir s’étendirent sur l’herbe et les rochers. Tout le monde finit par apprendre le sang sur ces mains. Elle perdit la respectabilité, devint une autre Dappir. Pour cette Dappir là, ignorée de tous, chassée de partout, il n’y eut de place dans ce village où elle était née, avait grandit, souffert, même dans le cimetière où étaient enterrés ses proches… Alors, elle vendit tout ce qu’elle pouvait, et elle s’installa dans un village de Kuzuova.

Quand Dappir est-elle arrivée dans ce village, comment les pierres jetées l’ont poursuivies jusqu’ici, nul ne le sait. Tout ce qu’on sait, c’est que personne n’aime Dappir, désormais.
.../... " LA SUITE
 
                                       \\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\##################~~~~~~~~

 

                       A vis à la population:
         (A la guerre comme à la guerre sur les bords de l'estuaire)
 
          Au lieu de s'escrimer à trouver chaussure à son pied
utiliser
             la botte secrète.
 
                                                     \\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\|||||||||||||||||||[[[[[[[
 

 



GOUEL BREIZH (à vos souhaits!)
 

                                                           \\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\[[[[[[[[[[[[[[[{{{{{{{{{


Elle était pleine,
pleine de nuages ma lune
qu'elle envoyait
sous ses aguets,
                        paître dans le ciel
 

 
 
 La note était salée.
                                Comment faire autrement?

 


 
C'est par là, la mer.
 
       illustration: SNSM
 
 ça peut toujours servir:
 

jeudi 12 mai 2022

approchant

"Hypocrite lecteur, mon semblable, mon frère"
Charles Baudelaire 
 

" Nous avons tous un double, un radieux ange gardien de notre adolescence passée qui est mort pour nous... Ou bien nous en avons perdu la mémoire frémissante. Nous l'avons tué une seconde fois. Alors nous vieillissons très vite. Ou bien nous lui rendons la première place, le commandement secret de nos actes, pour nous aider à vivre - mais sans jamais oublier la mort qui vibre tout près - et pour n'avoir pas à nous regarder dans la glace en nous méprisant nous-mêmes. Nous avons chacun ce fantôme gracieux, plus ou moins caché, oublié, bafoué, ou vivant en nous.[...]"
Jean-Edern Hallier extrait de: "Je rends heureux" 
 
 

"Et c'est précisément le rôle de la philosophie de révéler aux hommes l'utilité de l'inutile ou, si l'on veut, de leur apprendre à distinguer entre deux sens du mot utile."
Pierre Hadot


 
 
"Il vaut mieux rêver sa vie que la vivre", disait Marcel Proust. Qu'on me permette d'infléchir la pensée du plus exigeant des philosophes, de sorte que rêver sa vie, ce serait la vivre deux fois. Ce qui me dispensera d'infirmer, en pure perte, que toute ressemblance..."
Maud de Belleroche 
 
 
"On n'a pas le droit d'emmerder un lecteur qui ne vous a rien fait."
Lucien Jerphagnon

extrait du "Travailleur de l'ouest" (années 30) source "Saint-Nazaire l'Entre- Deux-Guerres
 de Sophie Danet et Paul Bauduz Editions C.M.D.
 

"ne pas oublier que les gens ne vous pardonneront jamais le bien que vous leur avez fait. C'est là une constante de la loi d'ingratitude... Un bienfait ne reste jamais impuni"
Pierre Assouline 
 

"L'air du temps s'engouffre dans les esprits proportionnellement au vide qu'il y trouve, la culture constituant le seul filtre efficace."
Lucien Jerphagnon

 

"Prétendre persuader le monde que l'association de ce haut clergé gavé d'or et d'ignorance, de ces sinistres généraux d'opérette et de boucherie et de ces propriétaires fonciers abrutis par des siècles de domination sans contrainte et d'inculture sans élégance, représentent l'esprit et la morale est bien la plus lugubre des farces.
 
Ce sont les professeurs d'esprit et de morale qui massacrent les innocents"
Elie Faure 
 

      INFOS

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"Sous la poésie des textes, il y a la poésie tout court, sans forme et sans texte."
Antonin Artaud

 

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