Il avait dû s'y résoudre, pour un temps élastique,
il ne ferait plus de photos avec ce qui chatouillait son champ visuel.
Le rouge appareil après un ultime cliché avait fait un drôle de bruit,
un peu comme un pchuit, d'un ballon qui se dégonfle
ou un rôt incontrôlable après un repas trop copieux,
ce qui n'était pas du tout dans son genre ni son rôle.
Et, depuis lors il avait refusé de montrer le moindre signe de vie.
Idée cocasse peut-être, mais il avait pensé que c'était dommage qu'il ne l'ai pas pris en photo,
son appareil.
Après tout il lui devait bien ça. Cela faisait quelques années qu'il l'accompagnait
pour suivre les rides sur l'eau, les cargos à double sens, les volatiles iodés, les êtres et le gros temps.
Mais c'est con pour qu'il puisse faire bonne impression, il aurait fallu qu'il ait un autre appareil, un de secours pour les cas -et zou-
Un peu comme celui qu'il avait retrouvé au fond d'un tiroir, celui qui utilisait avant,
au siècle dernier...
Seulement lui il n'avait fait aucun bruit, juste la gueule sans doute qu'on le ressorte
pour appeler à l'aide après tant d'années.
C'est con, j'aurais dû le prendre en photo, se dit-il...
En attendant, il ne lui restait plus qu'à aller jouer au casino des Mille Colonnes; le dimanche soir, c'était
souvent son jour de chance ..
"Si je n'ai pas retrouvé
Dans tes yeux la lumière
C'est que ton cœur a lâché
Tes poumons, une rivière
Dans le château des secrets
Tu es le moins âgé
Tu en connais des secrets
Tu les dis pour pas les oublier
Oublier tes enfants
Et les enfants de tes enfants
Oublier ton prénom
Et le chemin de la maison
Le précieux de ton passé
De tes joies, tes colères
Tu ne peux pas t'en rappeler
C'est le vent qui te fait toujours taire
Si le vent a dévasté dans tes yeux
Le reste de lumière
On pourra se retrouver tous les deux
Bien au chaud sous la Terre
Et oublier tes enfants
Et les enfants de tes enfants
Oublier ton prénom
Et le chemin de la maison
Oublier tes enfants
Et les enfants de tes enfants
Et oublier ton prénom
Et le chemin de la maison"
On s'installe dans un présent qui suffit à la nuit. A la nuit et au jour.
On s'assoit sur la pierre en plume d'oie de l'éternel retour.
Et les regrets sont morts, et ils s'effilochent et tombent tombent dans le cendrier.
On regarde les voitures qui filent avec les orages et le remue-ménage du sang dans les veines.
Un chat s'échappe d'une artère, des fleurs frissonnent sur une plaque de marbre,
la pluie s'évapore de tes mains,
c'est presque facile de ne tenir à rien, à si peu, à ce qui tient, ou juste à ce qui est juste.
Un néon rose allume un jour noir et tu marches dans les rues en balançant les hanches.
Un sac en plastique tourbillonne exprès et danse dans la légèreté du vent
et tu fermes les yeux sur cette beauté qui bouge. Tu ne rêves pas.
Et la nuit s'écrit presque sans toi.
Une phrase en boule qui comble les cavités des incertitudes.
On jurerait que les mots ont des yeux, des mains et un corps, puisqu'on pourrait trembler "
Brigitte Giraud "Tenir juste à ce qui tient"- Chez:"Paradis Bancal."
Marianne
ma soeur
Marianne
ne vois-tu rien venir?
actu
-horizon-
alité:
Dessins source: Marianne n°1246
Hé!
pendant ce temps là:
Décembre sous l'eau et dans le vent
"Que
d'eau en ce dernier mois de l'année à Ouessant : 160,3 mm soit + 71% de
précipitation (par rapport à la normale de 1981 à 2010). Le train
dépressionnaire ne s'est pas arrêté durant près de trente jours
consécutifs. Attention, retenez votre souffle, voici les rafales
maximales (en km/h) Enregistré à Ouessant au cours de décembre: 104 le
3, 90 le 4, 112 le 5, 86 le 7 et le 9, 91 le 10, 94 le 11 , 111 le 15,
122 le 16, 100 le 18, 97 les 19, 21 et 24, 130 le 23, 105 le 26, 144 le
28 et enfin 101 km / h le 29 décembre. La température de l'air a oscillé
entre 13,3 °C (maximum atteint le 18) et 3,5 °C le 31 décembre.
L'eau
de mer en surface est passée de 13,8 ° C le 1er décembre à 12 °C le 31.
Des pics de houle à près de 10 mètres ont ponctué tout le mois : les 4,
5, 11, 14, 16 et 20 décembre. Une mer monstrueuse a frappé l'île les 23
et 27 décembre avec 12,50 mètres maximum et encore 15,20 mètres mesurés
aux Pierres Noires le 28 décembre. Il faisait bon être à terre en ce
mois de décembre 2020!
Janvier source de lumière
La nuit du 6 janvier 2021,
des averses de grêle très violentes ont recouvertes l'île d'un paletot
blanc durant près de 48h selon les sites (le bourg fut particulier
touché). D'ailleurs en ces premiers jours de l'année, la température est
descendue à 2,8 °C et des gelées matinales nous ont surprises deux
jours consécutifs. Ce bel anticyclone, qui s'st établi la première
partie du mois de janvier, nous a permis de profiter de vives lumières,
presque aveuglantes, tant le soleil nous a manqué durant le mois de
décembre.
Le
cumul des précipitations est "de saison" en ce mois de janvier avec
116.3 mm (soit +28% par rapport à la normale de 1981 à 2010). Les
températures de l'air sont plus douces en cette fin de mois (12,1°C
maximum le 19) avec le retour du suroît (maximum 100,8 km/h en rafale le
20/01).
La
houle, quasi inexistante jusqu'au 12 janvier, a ressurgi avec le retour
du front chaud: cinq mètres au maximum du 13 au 19 janvier. Puis
l'arrivée d'une perturbation a donné des pics jusqu'à 10,70 le 20
janvier. La température en surface de la mer d'Iroise est passée de 12,3 ° C au début du mois à 10,90 ° C en ces derniers jours de janvier.
Foire aux moutons en plein air
Le mercredi 3 février 2021
si tiendra le rassemblement festif de la foire aux moutons autour de la
salle polyvalente. Ce sera surtout la fête de l'école Jacques Burel et
du collège des îles du Ponant où l'association des parents d'élèves vous
propose des boissons chaudes et des gâteaux à emporter. Une tombola est
aussi organisée sous la forme de billets à gratter, tous gagnants, qui
sont déjà présents dans les commerces. Retrouvons-nous à la foire pour
soutenir les établissements scolaires insulaires et retirer les lots de
la tombola.
Le repos biologique a sonné
Dès
la mi-janvier à Ouessant, nous avons pu observer que les bars et les
lieus jaunes étaient grainés à plus de 50%. Il était donc temps pour le
Finis Terrae d'arrêter de ponctioner, même homéopathiquement ces stocks,
et ainsi laisser le temps à nos ressources halieuthiques de se
régénérer sereinement.
Il
est désormais primordial de ne plus consommer les poissons en période
de reproduction. Les stocks autour d'Ouessant connaissent une forte
baisse avérée depuis 10 ans. Respecter la période de frai des lieus
jaunes et des bars c'est prôner leur survie pour les années à venir. A
Ouessant, nous avons tous eu le temps de mettre au congélateur quelques
prises pour nous sustenter cet hiver. Et les retrouvailles début avril
avec ces espèces, ne sera plus qu'appréciable !
La Lumière triomphante d'Imbolc
Après
la Samain, qui marque le début de l'année chez les celtes, se tient
Imbolc, à l'origine fêté le 1er février. Imbolc est la fête de la
renaissance, de la fécondité et de la purification sous la protection de
la déesse mère "Brigid". Nous ressentons désormais très fortement
l'allongement des jours et les prémices du printemps à Ouessant: les
saules sont couverts de bourgeons, les narcisses sont en fleurs sur la
côte et les premiers agneaux voient le jour. Cette année, c'est même la
toute première génisse de race jersiaise qui est née sur l'île et qui
porte le nom fort symbolique de "Spi" (espoir en breton).
Un
rituel était de mise pour accueillir cette renaissance de la vie. Le
soir, la lumière et la chaleur jaillissaient dans les foyers grâce aux
nombreuses chandelles allumées à cette occasion. Il était aussi de
coutume de déguster des «bannock» (pains de céréales non levés)
symbolisant l’astre solaire vainqueur des ténèbres. Cette préparation
culinaire fait référence aux quatres éléments fondamentaux : la farine
qui la compose symbolise la terre, et c'est aussi essentiellement l'eau
qui lui donne sa consistance finale. Le feu permet de la cuire et c'est
dans les airs qu'elle saute pour se retourner. Ainsi la Chandeleur et sa
tradition de dégustation de crêpes aux chandelles retrouve toute sa
symbolique le 2 février."
"Il
y toujours quelque part
un homme assis sur un banc qui chante et
pleure,
une femme qui penche son dos à
la terre
et les cheveux au vent
et les yeux dans la peine
des quais gris,
un bateau qui vient
un bateau qui part,
une
mémoire
ancienne nourrit par nos pères
et nos mères
qui
se pose en nous comme un oiseau de fer, une ligne d'horizon fière,
un
oiseau chanté
les jours de pluie et de soleil,
qui se pose à
terre
qui s'élance
loin de l'amarre
et revient au nid un soir, à
la tombée
de la nuit sans étoiles,
fêté
par la terre et loué
par la mer."
Marie "Les contes de Shanaty"
"L'oubli est un gigantesque océan sur lequel navigue un seul navire, qui est la mémoire.
Pour l'immense majorité des hommes, ce navire se réduit à un rafiot misérable qui prend l'eau à la moindre occasion et dont le capitaine, personnage sans scrupules, ne songe qu'à faire des économies."
Amélie Nothomb- Extrait de: "Hygiène de l'assassin."
"Enseignant en lycée
depuis 28 ans, je constate chaque jour l’influence des thèses
complotistes, notamment sur le COVID. Mais les réponses proposées par
mes autorités de tutelle me paraissent contre-productives : je m’en
explique dans cette tribune.
Il ne se passe plus un jour désormais sans que le parfum de
scandale de propos conspirationnistes ne vienne pimenter la revue de
presse quotidienne : comme toute saveur épicée, on finit par s’y
habituer. Peu à peu, les rôles se précisent et le scénario se
stabilise : alors que les complotistes plus ou moins professionnels
s’installent dans une posture de provocation organisée, les pouvoirs
publics, doublement flanqués des « experts » et de certains médias, se
changent en maîtres d’école. Ainsi la pièce a-t-elle des chances de
jouer à guichets fermés (si l’on peut dire en ces temps de black-out
culturel) pendant assez longtemps. Comme dans une dispute rituelle de
couple, les partitions se répondent selon une ordonnance stricte. Au
pavé dans la mare (le vaccin contient des puces électroniques, la 5G
transmet le coronavirus, Hillary Clinton dirige un réseau satanique dans
l’arrière-boutique d’une pizzeria) répondent les coups de règle sur les
doigts : ces gens n’ont pas bien compris, il faut leur réexpliquer la
leçon, en commençant par les faits. Debunkage, fact checking, sont les maîtres mots (anglo-saxons) de ce discours du maître. Les « fautes » sont soulignées en rouge sur la copie.
Bien sûr, les coups de menton ne sont pas sans accompagner les coups
de règle ; et derrière la rectification du vrai se profile une remise
dans les rangs somme toute morale –sinon politique. Foucault nous avait
appris que toute affirmation de la raison, comme à l’âge classique avec
Descartes, serait inséparable d’un geste de police (au sens de
gouvernementalité) : « Mais quoi, ce sont des fous, et je ne serais pas
moins extravagant si je me réglais sur leurs exemples ». Rien que de
justifié, si on en juge par les excès des brigades trumpistes et les
dégâts sanitaires potentiels des anti-vaccins : le gouvernement français
aurait donc « raison » de proposer, en vain pour l’instant, une loi
interdisant les propos jugés haineux sur Internet, et Twitter de
sanctionner le Président, complotiste en chef. De l’interdiction
d’entretenir la violence, on glisse à l’interdiction de dire le faux
(loi anti fake news, mais aussi lois mémorielles déjà anciennes).
Les fous d’aujourd’hui, soit les conspirationnistes, ne seraient donc
plus enfermés, mais bâillonnés ? Toute la question réside dans
l’efficacité de cette surenchère, réponse symétrique à une désinhibition
sans doute croissante des propos orduriers.
Ce qui reste peu mentionné, c’est le paradigme scolaire à l’œuvre
dans ce théâtre politico-médiatico-moral. L’école est systématiquement
appelée à l’aide : les réponses doivent être « éducatives » :
« éducation à… » (l’information, la citoyenneté, la laïcité…),
« ressources » (en ligne), « boîte à outils » didactiques, « bonnes
pratiques ». D’où le statut aujourd’hui éminent d’un Jean-Michel
Blanquer qui n’est pas seulement Ministre de l’Education dans le cadre
scolaire mais aussi, par un rayonnement qui s’étend bien au-delà, ultime
garant de la laïcité, du lien social, du vivre-ensemble. À chaque
incident, on fait une loi pour renforcer les sanctions, mais aussi on
ajoute une formation. Exemple fourni récemment aux enseignants (sur un
site hébergé par Google) : « Citoyenneté à l’heure du numérique », un
site canadien. On retrouve toujours, au fond, les mêmes analyses à
courte vue : les errements des conspirationnistes attribués à des
erreurs de logique (les fameux « biais cognitifs »), la référence aux
« experts », alors que celle-ci, sans aucun doute, fait partie du
problème. On continue à croire, avec l’aplomb de ceux qui ne doutent
jamais de rien, que les « anti-système » ont juste quelques lacunes
informationnelles (non seulement les anti-vaccins et les QAnon
d’ailleurs, mais aussi, par la même occasion, les anti-pesticides, les
anti-OGM ou les anti-nucléaires, régulièrement épinglés par les
« experts » de l’Association Française pour l’Information Scientifique,
héraut de la lutte anti-conspi).
Ce qui est nouveau dans le dossier québécois, c’est qu’il est suggéré
aux enseignants, non sans finesse, de ne pas braquer inutilement les
supposés sympathisants des théories du complot, mais de faire preuve d’
« empathie » avec eux. Cette prescription pédagogique de bienveillance
contraste singulièrement avec les directives transmises aux enseignants
au sortir du premier confinement, suggérant que toute position non
"positive", de la part des élèves, pouvait être potentiellement
« communautariste » et « complotiste » et appelait des réponses plutôt
fermes. En-dehors de cette incitation à l’empathie, les quelques
activités proposées sont toujours dans la même veine : il y a des videos
et des "défis" interactifs, puisqu’il faut être moderne, mais on se
contente pour l’essentiel d’adopter une pédagogie de la suggestion :
faire lire aux élèves un texte qui dit que le complotisme, ce n’est pas
bien. « Je respecte ton point de vue, Kevin, mais es-tu sûr d’avoir
compris ? Essaie encore ». Et n’oublie pas d’ajuster ton masque pour le
"vivre-ensemble". Comme il est dit dans les spots du gouvernement à la
radio."
Julien Cueille (professeur de philosophie, chargé de cours à Montpellier-3, auteur de Le Symptôme complotiste, Eres, 2020) source: "Lundi Matin"
" L’histoire est un livre de porcelaine, la pulsation est fille de brasier. Je n’suis rien que midi quand les ports somnolent, je n’reviens pas pareil, pas pareil, la nuit d’un serment sera close No sin, no redemption No sin, no redemption No sin le temps je le passe à dessiner des ombres, je n’reviens pas pareil, pas pareil, la nuit d’un secret sera close No sin, no redemption
Avant même de sauver le monde, je crois que la poésie sauve le poète. Il
écrit ou elle écrit où j'écris parce que ça représente une sorte de
manuel de survie à la panique intérieure.
"Les Français ne connaissent qu’un seul
mot en breton, kenavo, soit au revoir. Pourquoi ne sait-on pas comment dire
bonjour ? Parce qu’il existe des dizaines de façons de l’exprimer !
Savez-vous qu’en breton l’herbe et le ciel sont de la même couleur ?
Que le bateau est féminin mais que la mer est masculin ?
Que le breton possède des lettres qui n’existent pas en français, comme le c’h et le ñ, mais
qu’à l’inverse le c, le q et le x sont inconnus ?
Voici quelques-uns des sujets exposés dans ce petit livre, issu de
chroniques parues dans le magazine Bretons. Ceci n’est pas une méthode
pour apprendre le breton. Ce livre va simplement tenter de vous montrer
en quoi, vraiment, la langue bretonne voit le monde différemment. Et
donc, peut-être, vous convaincre qu’elle est précieuse et qu’elle mérite
qu’on la parle, qu’on l’enseigne, qu’on se batte pour elle." source
La crise du coronavirus est l'exemple même d'un processus intersocial généralisé que les structures étatiques ne parviennent pas à maîtriser.
Cette crise sanitaire est la première dans l'histoire de l'humanité qui affecte tout le monde, de manière intime et dans un temps commun.
Il est donc nécessaire de repenser la régulation non plus à la seule échelle nationale comme autrefois, mais à travers des formes nouvelles de gouvernance à l'échelle mondiale, non pas par le truchement d'un gouvernement mondial, impensable et non souhaitable, mais comme une protection solidaire des nations face à une menace globale."
Bernard Badie extrait d'un entretien avec Stéphane Aubouard Marianne
"Hassani est née en Iran en 1988 de parents afghans originaires de
Kandahar. Elle se passionne pour le dessin depuis son enfance, mais il
ne lui est pas possible de développer son talent immédiatement. En Iran,
en effet, les études artistiques sont interdites aux réfugiés afghans.
Elle a donc étudié en autodidacte et, à son retour en Afghanistan en
2009, elle s’est inscrite au cours d’art traditionnel à l’université de
Kaboul. Cependant, le véritable tournant s’est produit en 2010,
lorsqu’elle s’est inscrite à un cours organisé par Combact Comunications
et tenu par l’artiste de rue anglaise Cha. À cette occasion, elle a
appris les bases de l’art du graffiti et sa production artistique, à
partir de ce moment, s’est principalement concentrée sur les murs en
plein air.
Elle comprend immédiatement, en fait,
les avantages de ce tournant artistique. Les outils de création de ses
œuvres deviennent plus accessibles économiquement et, enfin et surtout,
ses propres œuvres deviennent accessibles à tous ceux qui passent par
là. Un facteur à ne pas sous-estimer dans un pays comme Kaboul, qui est
déchiré par la guerre et où il y a un manque d’espace pour le partage
artistique. A partir de ce jour, Hassani a commencé à voir les rues de
sa ville comme des galeries en accès libre, ses toiles privilégiées
devenant des ruines, des murs qui s’effondrent, des coins de rue oubliés
qu’elle peut faire revivre avec ses dessins.
Ses œuvres, en effet, ne passent pas
inaperçues, car elles se caractérisent par un fort pouvoir évocateur et
communicatif. Hassani, inspirée par le style métaphorique de Banksy,
crée des dessins dans lesquels, à partir de la combinaison inhabituelle
d’éléments simples, une narration émerge. Elle ne se limite pas à
dessiner principalement des femmes, mais les représente dans des moments
profondément magiques et évocateurs : des femmes qui chatouillent les
fenêtres des immeubles avec leurs doigts, les transformant en clavier de
piano, les fissures qui s’ouvrent sur les murs deviennent dans ses
images des horizons, d’où partent des routes qui mènent ailleurs, les
molécules de Covid, tremplins pour la poursuite d’une fleur traînée par
le vent.
Il est certain que sa vie n’est pas facile, en tant que femme qui peint
et en tant que femme qui peint dans la rue. Ses mouvements peuvent
corrompre les yeux des passants avant même les images qu’elle propose. En fait, bien que l’art de rue ne soit pas illégal en Afghanistan,
son travail a été considéré comme offensant pour la morale du pays.
C’est pourquoi Hassani doit toujours être très rapide dans la
réalisation de ses dessins. Mais, malgré les difficultés, son combat se
poursuit sans relâche dans les rues de Kaboul, où les femmes qu’elle
dessine dansent, chantent et jouent, résistant au nom d’une certitude
indéniable qu’aucune loi, aucune interdiction, au nom d’aucune morale,
ne pourra jamais interdire aux femmes de rêver et de dessiner."
Ilaria Paluzzi extrait de: "Un art de résistance aujourd'hui" -suite de son article dans KEDISTAN