" Méprisant depuis toujours les maîtres qui ont des mœurs d'esclaves comme
les esclaves impatients de se glisser dans la peau des maîtres, j'avoue
que les affrontements habituels entre les hommes et les femmes ne m'ont
guère préoccupée. Ma sympathie va plutôt à ceux qui désertent les rôles
que la société avait préparés pour eux."
Annie Le Brun
"Ce que l'on aime avec violence finit toujours par vous tuer."
Guy de Maupassant
" Les doutes, c'est ce que nous avons de plus intime."
"Toutes les fleurs qui poussent reviennent comme les saisons Même si on les coupe, elles refleuriront Quand par amour on donne leurs cadavres jolis Toujours elles nous pardonnent de leur enlever la vie
Leurs parfums angéliques de tout temps nous séduisent Illusions alchimiques qui jamais ne s'épuisent Elles pleurent souvent les choix que nous faisons Et rêvent que l'on soit un jour un peu moins cons
Peut-être qu'elles sont là simplement pour rappeler Le décevant constat de notre humanité Un jour elles sont belles, mais sitôt contrariées Elles battent de l'aile, abdiquent sans batailler
Ne sommes-nous pas les fleurs d'une autre dimension Fleurissant quelques heures le temps d'une chanson Accumulant amours, guerres et trahisons Pour oublier le jour où tous nous fanerons
Je n'offre pas de fleurs aux gens que j'aime bien Elles me font trop peur, me rappellent la fin Je préfère des yeux les voir sans les toucher Laisser les vents joyeux abîmer leur beauté
Le jour où sur la Terre elles auront disparu Je sais, du moins j'espère, que nous n'y serons plus Que régnera en maître un silence grandiose Et qu'enfin pourront naître sans désordre les choses
Le jour où sur la Terre elles auront disparu Je sais, du moins j'espère, que nous n'y serons plus Que régnera en maître un silence grandiose Et qu'enfin pourront naître sans désordre les choses"
"nous sommes un peuple
aux colonnes de vent
aux portes estuaires
aux rires de pluie
aux chants d’outre-terre
aux vertèbres de plomb
au masque mortuaire
aux lampes d’argile
aux barrières de feu
aux cris crépusculaires
aux ongles noueux"
Paol Keineg
"Dans les contes de nos pères on parlait d'ogres :
Des ogres terrifiants, mangeurs d'hommes.
L'histoire parle d'espèces de fauves au fond
Des forêts : des mangeurs d'hommes.
Quelle horreur et quel dégoût d'y penser.
Cependant, parmi nous, tout près,
il en est qui dévorent les autres. Tout crus, oui.
Des ogres qui sucent le sang jusqu'à la dernière goutte.
- Je ne peux pas croire qu'il existe parmi nous
Des gens aussi cruels, aussi lâches ;
Il faut que ce soient des insensés.
- Non, aveugles ! Oh, ils ont l'œil vif, mais
L'esprit obscurci, ou plutôt le cœur.
Ils ne voient pas comme la vie des autres est difficile
Et ils attaquent, griffent, rongent, écorchent
L'autre jusqu'au dernier sou.
Et toi, travaille si tu veux, jour et nuit, sans cesse
Comme une bête de somme. Pire.
Dimanches, fêtes, chaque jour sans répit,
Jusqu'au cimetière.
Eux par contre se promènent, roulent, font aller
l'éclair de leurs voitures de-ci, de-là,
ils courent après leur plaisir : les ogres.
Et toi, mon pauvre... Gare à toi si tu te trouves
sur leur route avec ta vieille carriole ou
ta vieille jument...
Prends garde !
On t'aplatira comme un œuf, comme un
champignon !
Tu vois bien que toute la route
est à eux...
Avec un peu de chance, pourtant, tu pourras
passer sous une bordée d'injures.
En français, bien sûr. Ça, c'est une langue civilisée."
Paol Keineg
"Aussi secrets que les voyages
sont les poèmes
ils ne connaissent
comme les bouteilles à la mer
que le pont
le cœur d'où ils sont tombés.
"
Yvon Le Men
"La Bretagne a t'elle autant de charme
pour border de sable l'horizon
pour colorer mes yeux de ses vagues
et couronner mon front de ses algues
J'ai des landes farouches dans la tête
J'ai des vents parfumés dans l'oreille
Le ressac palpite dans mon coeur
J'ai des huîtres et du vin dans ma bouche..."
Gilles Servat
"Je n’aime pas
qu’il y ait en moi
ces espèces de brouillards
qui empiètent sur mon domaine
et ne me laissent pas voir
où je suis, où j’en suis.
Alors j’attaque, je ramasse
tout ce qu’au-dedans je trouve
et tout ce qu’au-dehors j’arrache
Comme clarté ou moyen d’en faire naître.
Dans ce dehors,
les mots percent.
Les mots sont des épées
contre les ventres des brouillards."
Eugène Guillevic
" ..Car la Bretagne n'a d'existence que par l'idée que les bretons s'en font."
A la "veille" d'une nouvelle manifestation pour la réunification administrative de la Bretagne
samedi 24 septembre à Saint-Nazaire, un peu d'histoire locale avec quelques photos de la précédente
sur le territoire nazairien en 1977 au Parc Paysager avec un samedi concerts et prises de parole sous chapiteau (Alan Stivell etc) et le lendemain défilé dans la ville, où l'on put apercevoir au milieu des participants un ex-éducateur/député et futur ministre de la santé socialiste. Notons également que le Maire socialiste z'également (de l'époque) avait reçu une délégation et fait pavoiser l'édifice municipal aux couleurs de la Bretagne. Le maire actuel socialiste z'aussi en fera t-il de même? la dernière fois qu'il a osé la chose c'était légèrement forcé... pour un hommage rendu sur le parvis de la mairie a un militant et historien breton, il se dépécha de faire disparaitre le Gwenn ha du au bout de quelques jours.
"Jamais une statue ne sera assez grande
Pour dépasser la cime du moindre peuplier
Et les arbres ont le cœur infiniment plus tendre
Que celui des hommes qui les ont plantés
Pour toucher la sagesse qui ne viendra jamais
J'échangerais la sève du premier olivier
Contre mon sang impur d'être civilisé
Responsable anonyme de tout le sang versé
Fatigué du mensonge et de la vérité
Que je croyais si belle, que je voulais aimer
Et qui est si cruelle que je m'y suis brûlé
Fatigué d'habiter sur la planète terre
Sur ce grain de poussière, sur ce caillou minable
Sur cette fausse étoile perdue dans l'univers
Berceau de la bêtise et royaume du mal
Où la plus évoluée parmi les créatures
A inventé la haine, le racisme et la guerre
Et le pouvoir maudit qui corrompt les plus purs
Et amène le sage à cracher sur son frère
Fatigué de parler, fatigué de me taire
Quand on blesse un enfant quand on viole sa mère
Quand la moitié du monde en assassine un tiers
Fatigué de ces hommes qui ont tué les Indiens
Massacré les baleines et bâillonné la vie,
Exterminé les loups, mis des colliers aux chiens
Qui ont même réussi à pourrir la pluie
La liste est bien trop longue de tout ce qui m'écœure
Depuis l'horreur banale du moindre fait divers
Il n'y a plus assez de place dans mon cœur
Pour loger la révolte, le dégoût, la colère
Fatigué d'espérer et fatigué de croire
A ces idées brandies comme des étendards
Et pour lesquelles tant d'hommes ont connu l'abattoir
Je voudrais être un arbre, boire l'eau des orages
Me nourrir de la terre, être ami des oiseaux,
Et puis avoir la tête si haut dans les nuages
Qu'aucun homme ne puisse y planter un drapeau
Je voudrais être un arbre et plonger mes racines
Au cœur de cette terre que j'aime tellement
Et que ce putain d'homme chaque jour assassine
Je voudrais le silence enfin, et puis le vent...
Fatigué de haïr et fatigué d'aimer
Surtout ne plus rien dire, ne plus jamais crier
Fatigué des discours, des paroles sacrées
Fatigué de sourire, fatigué de pleurer
Fatigué de chercher quelques traces d'amour
Dans l'océan de boue où sombre la pensée"
Rester vivant, dit la voix, s'applique aussi à toutes les filles, qui que vous soyez restez vivant à cause du vent lisse dans les roses et dans vos délires, restez vivant, montrez-vous avec vos syllabes et vos images, n'ayez pas peur de toucher à votre mélancolie, restez vivant malgré les mouches et les brûlures, les petites décorations, les armoires fermées de chacun, restez vivant les bras ouverts comme les pages d'un dictionnaire, respires haut et fort entre les signes les miroirs les petits croquis, n'oubliez pas votre grigri et la grammaire latine, restez vivant malgré votre mère dans son bain, les terroristes et les menteurs, restez vivant dans l'axe de la lune et touchez, touchez donc à vos miroirs aux bons endroits avant de vous regarder partir.
Restez vivant comme quelqu'un qui n'est pa vous."
Nicole Brossard
"Je me mettrai un jour
À travailler vraiment
Et mon premier souci
Sera de surveiller la forme des nuages"
Depuis que Fabien Roussel a, sur un stand de la Fête de l’Humanité, fustigé « la gauche des allocs », le débat n'en finit plus de s'éterniser(oui,
oui) : le travail, est-ce un truc de droite, un truc de gauche, un truc
du centre ? Au fond, qu’est-ce que la gauche ? Et qu’est-ce que
l’Homme ? Depuis le cimetière du Père-Lachaise où il est enterré, Paul
Lafargue a tenu à intervenir dans ces discussions. Cette envie a été
titillée par Sandrine Rousseau – ô Paresse, mère des arts et des nobles
vertus – qui a parlé, en réponse au leader communiste, de « droit à la paresse », le titre d’un pamphlet publié en 1883 par ce cher Paul.
(Utile
précision : Paul Lafargue n’étant plus vivant et le texte de cette
interview, tiré du « Droit à la paresse », pamphlet qui a un peu vieilli
dans la forme, nous nous sommes autorisé de petites coupes. Les
questions sont d’aujourd’hui, faut-il le préciser…)
Paul Lafargue, que pensez-vous des propos de Fabien Roussel ?
" Une
étrange folie possède les classes ouvrières des nations où règne la
civilisation capitaliste. Cette folie est l’amour du travail, la passion
furibonde du travail, poussée jusqu’à l’épuisement des forces vitales
de l’individu et de sa progéniture. Au lieu de réagir contre cette
aberration mentale, les prêtres, les économistes, les moralistes, ont
sacro-sanctifié le travail."
Etes-vous en train de nous dire, comme le suggère Sandrine Rousseau, que le travail, c’est « une valeur de droite » ?
"Le prolétariat, trahissant ses instincts, méconnaissant sa mission
historique, s’est laissé pervertir par le dogme du travail. Rude et
terrible a été son châtiment. Toutes les misères individuelles et
sociales sont nées de sa passion pour le travail. La morale capitaliste,
piteuse parodie de la morale chrétienne, frappe d’anathème la chair du
travailleur ; elle prend pour idéal de réduire le producteur au plus
petit minimum de besoins, de supprimer ses joies et ses passions, de le
condamner au rôle de machine délivrant du travail sans trêve, ni merci.
Les économistes nous prêchent la théorie malthusienne, la religion de
l’abstinence et le dogme du travail ? Mais il faudrait leur arracher la
langue et la jeter aux chiens."
Donc c’est un truc de droite ? Je voudrais être sûr de bien comprendre…
" Les socialistes révolutionnaires ont à recommencer le combat qu’ont
combattu les philosophes et les pamphlétaires de la bourgeoisie ; ils
ont à monter à l’assaut de la morale et des théories sociales du
capitalisme ; ils ont à démolir, dans les têtes de la classe, appelée à
l’action, les préjugés semés par la classe régnante ; ils ont à
proclamer, à la face des cafards de toutes les morales, que la terre
cessera d’être la vallée de larmes du travailleur…"
Ok, ok. On a compris. Vous voulez quoi, un revenu universel ? Avec ça,
on va se retrouver avec des zombies « netflixés » qui passent leur
journée en slip sur un canapé…
"Sublimes estomacs gargantuesques, qu’êtes-vous devenus ? Nous sommes
bien dégénérés et bien rapetissés. Quand, dans notre Europe civilisée,
on veut retrouver une trace de la beauté native de l’homme, il faut
l’aller chercher chez les nations où les préjugés économiques n’ont pas
encore déraciné la haine du travail. L’Espagne, qui, hélas ! dégénère,
peut encore se vanter de posséder moins de fabriques que nous de prisons
et de casernes ; mais l’artiste se réjouit en admirant le hardi
Andalou, brun comme des castagnes, droit et flexible comme une tige
d’acier ; et le cœur de l’homme tressaille en entendant le mendiant,
superbement drapé dans sa capa trouée, traiter d’amigo des ducs
d’Ossuna. Pour l’Espagnol, chez qui l’animal primitif n’est pas
atrophié, le travail est le pire des esclavages…"
Euh… L’Espagnol qui ne travaille pas ? Ce n’est pas un truc semi-raciste
que dirait un ministre du Budget d’un pays du nord de l’Europe, ça ?
" Les Grecs de la grande époque n’avaient, eux aussi, que mépris pour le
travail ; aux esclaves seuls il était permis de travailler : l’homme
libre ne connaissait que les exercices corporels et les jeux de
l’intelligence."
Mais il faut bien produire pour redistribuer. Vous pensez qu’elles tombent d’où les « allocs » ?
"Et les économistes s’en vont répétant aux ouvriers : travaillez,
travaillez pour augmenter la fortune sociale ! Prêtant l’oreille aux
fallacieuses paroles des économistes, les prolétaires se sont livrés
corps et âme au vice du travail, ils précipitent la société tout entière
dans ces crises industrielles de surproduction qui convulsent
l’organisme social. Alors, parce qu’il y a pléthore de marchandises et
pénurie d’acheteurs, les ateliers se ferment et la faim cingle les
populations ouvrières de son fouet aux mille lanières."
Ça s’appelle le capitalisme. Vous ne voudriez quand même pas casser la croissance ?
" L’abstinence à laquelle se condamne la classe productive oblige les
bourgeois à se consacrer à la surconsommation des produits qu’elle
manufacture désordonnément. Au début de la production capitaliste, il y a
un ou deux siècles de cela, le bourgeois était un homme rangé, de mœurs
raisonnables et paisibles ; il se contentait de sa femme ou à peu
près ; il ne buvait qu’à sa soif et ne mangeait qu’à sa faim. Il
laissait aux courtisans et aux courtisanes les nobles vertus de la vie
débauchée. Aujourd’hui il n’est fils de parvenu qui ne se croit tenu de
développer la prostitution et de mercurialiser son corps pour donner un
but aux labeurs que s’imposent les ouvriers des mines de mercure ; il
n’est bourgeois qui ne s’empiffre de chapons truffés et de Laffite
navigué, pour encourager les éleveurs de la Flèche et les vignerons du
Bordelais. A ce métier, l’organisme se délabre rapidement, les cheveux
tombent, les dents se déchaussent, le tronc se déforme, le ventre
s’entripaille, la respiration s’embarrasse, les mouvements
s’alourdissent, les articulations s’ankylosent, les phalanges se nouent."
Vous y allez fort, nous bénéficions tous des fruits de la croissance,
qu’il faut aller chercher avec les dents, je vous le rappelle…
"En présence de cette double folie des travailleurs, de se tuer de
sur-travail et de végéter dans l’abstinence, le grand problème de la
production capitaliste n’est plus de trouver des producteurs et de
décupler leurs forces, mais de découvrir des consommateurs, d’exciter
leurs appétits et de leur créer des besoins factices. Pour forcer les
capitalistes à perfectionner leurs machines de bois et de fer, il faut
hausser les salaires et diminuer les heures de travail des machines de
chair et d’os. Les preuves à l’appui ? c’est par centaines qu’on peut
les fournir. Dans la filature, le métier renvideur (self acting mule) fut inventé et appliqué à Manchester, parce que les fileurs se refusaient à travailler aussi longtemps qu’auparavant."
Attendez, Benoît Hamon, qui était d’accord avec vous sur la baisse du
temps de travail, voulait faire une taxe sur les robots ! Et là, vous
nous prônez le communisme de luxe automatisé !
"Si, en diminuant les heures de travail, l’on conquiert à la production
sociale de nouvelles forces mécaniques ; en obligeant les ouvriers à
consommer leurs produits, on conquerra une immense armée de forces
travail. C’est alors que le marché du travail sera débordant ; c’est
alors qu’il faudra une loi de fer pour mettre l’interdit sur le travail.
Il faudra, par des lois sévères, imposer aux ouvrières et ouvriers en
passementeries, en dentelles, en fer, en bâtiments, du canotage
hygiénique et des exercices chorégraphiques pour le rétablissement de
leur santé et le perfectionnement de la race. Du moment que les produits
européens consommés sur place ne seront plus transportés au diable, il
faudra bien que les marins, les hommes d’équipe, les camionneurs
s’assoient et apprennent à tourner les pouces. Les bienheureux
Polynésiens pourront alors se livrer à l’amour libre sans craindre les
coups de pied de la Vénus civilisée et les sermons de la morale
européenne."
"Je me suis pris à l'aile exquise du hasard
J'avais oublié de le dire
J'avais perdu le sens de la distance
Dans la débâcle du présent
Serré dans les filets rigides de la raison
Étouffé de forces précises
Je tournais sans comprendre autour de la maison
Assis debout perdu dans le délire
Et sans mémoire à remonter aux limites obscures
Plus rien à conserver dans les mains qui se brouillent
À retenir ou à glaner entre les doigts
Il n'y a que des reflets qui glissent
De l'eau du vent filtrés limpides
Dans mes yeux
Et le sang du désir qui change de nature
Des images des images sans aucune réalité
Pour se nourrir "