"J'ai des envies très portuaire, d'enfumés bistrots, les orteils pris dans l'eau-salée- de tables lourdes et boisées, ornées de cartes étranges et improbables, sur lesquelles, tous sexes confondants, on referait le monde dans de délicates et tonitruantes chimères, des impressions du moment aussi justes et perfectibles qu'une existence fragile aussi propices à la déraison, aux chants beuglés, au solo trémolo qui fait éclore de lourdes larmes au buriné marin, revenu du tout et de rien. "In Dublin's fair city" J'ai des envies de Vent qui décoiffe de blanches crinières, de ride traçant sans vergogne son chemin de vie; de moitié de chacun reliant sa chacune et toutes combinaisons dehors, sans aucun droit d'auteur prenant son impossible double par le cou pour lui susurrer dans l'oreille, des inventions notables, de franches fragilités, à ne plus faire la cour, quand l'espace est immense et qu'il reste plutôt, à conquérir le devoir de se tromper d'effacer le catalogue des vérités convenues et de ne posséder au final que des envies d'être bien et là ensemble.au jeu du ni gagnant, ni perdant où toutes les grâces seraient permises,
avant la bascule du jour.
Quand est-ce qu'on mange?
"Inquiète-toi de ce que tu manges et non de qui te mangera." (proverbe)
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"La Convention citoyenne pour le climat exigeait un moratoire sur la
construction de nouveaux entrepôts de e-commerce. Mais le gouvernement
cherche, au contraire, à faciliter et accélérer leur implantation. Cet
automne, il a lancé une mission pour développer des sites logistiques « clé en main » et accroître l’attractivité de la France à l’international."la suite chez: REPORTERRE
Jean-Marie Barnaud extrait de: "Fragment d'un corps incertain"
Soirée au poêle
Fragrance des voiles de nuit
en apparence de brume entrelacée
au bois brûlé,
avant qu'il ne s'évade
dans la sorgue
"Je suis changeant, nous sommes changeants, le monde est changeant. La
seule chose qui ne changera jamais, c'est que tout change, tout le
temps."
Emmanuel Carrère extrait de: Yoga"
"Au loin toujours les rumeurs de moteur, quelques coups de fusils, des
aboiements perdus. L'azur par dessus tête à s'asperger la tronche dans
l'agonie tranquille. Et puis baisser les yeux tout au fond de l'herbe
trempée, des fossés dépeignés. Un pas d'un caillou l'autre sur les
chemins qui ne vont nulle part. Sans regarder plus loin que le bout de
ses pieds. J'ai la terre dans la main. C'est froid ça fait du bien. Bris
de verre d'oiseaux. Gueule de coq. Corbeau carnage. Une mésange toute
jaune sur la carcasse très bleu d'un voiture abandonnée. Une gorgée de
rouge-gorge et l'écorce écorchée d'un très vieil amandier. Miniature de
givre sur la mort des feuilles. Saveurs poisons secrets. Trois mille
éclats par centimètre au creux des plantes de rien dont personne ne se
souvient. Les baies fluorescentes et l'âtre des lichens. Les pourpres
oubliés. Petits bijoux pourris aux dernières grappe des vignes. Je
marche plus ignorant qu'un chien qui fourre sa truffe chaude dans les
tripailles du monde. Insecte, chasseur, passereaux, chat, promeneur. ça
charogne tranquille. Chacun à l'affut de sa goulée ventrue, sa part de
lumière à mâchouiller, sa raison de vivre."
" C’est un vieil homme debout à l’arrière d’un bateau. Il serre dans ses
bras une valise légère et un nouveau-né, plus léger encore que la
valise. Le vieil homme se nomme Monsieur Linh. Il est seul à savoir
qu’il s’appelle ainsi car tous ceux qui le savaient sont morts autour de
lui.
Debout à la poupe du bateau, il voit s’éloigner son pays, celui de ses
ancêtres et de ses morts, tandis que dans ses bras l’enfant dort. Le
pays s’éloigne, devient infiniment petit, et Monsieur Linh le regarde
disparaître à l’horizon, pendant des heures, malgré le vent qui souffle
et le chahute comme une marionnette.
Le voyage dure longtemps. Des jours et des jours. Et tout ce temps, le
vieil homme le passe à l’arrière du bateau, les yeux dans le sillage
blanc qui finit par s’unir au ciel, à fouiller le lointain pour y
chercher encore les rivages anéantis.
Quand on veut le faire entrer dans sa cabine, il se laisse guider sans
rien dire, mais on le retrouve un peu plus tard, sur le pont arrière,
une main tenant le bastingage, l’autre serrant l’enfant, la petite
valise de cuir bouilli posée à ses pieds.
Une sangle entoure la valise afin qu’elle ne puisse pas s’ouvrir, comme
si à l’intérieur se trouvaient des biens précieux. En vérité, elle ne
contient que des vêtements usagés, une photographie que la lumière du
soleil a presque entièrement effacée, et un sac de toile dans lequel le
vieil homme a glissé une poignée de terre. C’est là tout ce qu’il a pu
emporter. Et l’enfant bien sûr.
L’enfant est sage. C’est une fille. Elle avait six semaines lorsque
Monsieur Linh est monté à bord avec un nombre infini d’autres gens
semblables à lui, des hommes et des femmes qui ont tout perdu, que l’on a
regroupés à la hâte et qui se sont laissé faire.
Six semaines. C’est le temps que dure le voyage. Si bien que lorsque le
bateau arrive à destination, la petite fille a déjà doublé le temps de
sa vie. Quant au vieil homme, il a l’impression d’avoir vieilli d’un
siècle."
Philippe Claudel extrait de: "La petite fille de Monsieur Linh
"Que je sois née d'hier ou d'avant le déluge J'ai souvent l'impression de tout recommencer Que j'aie pris ma revanche ou bien trouvé refuge Dans mes chansons, toujours, j'ai voulu exister Que vous sachiez de moi ce que j'en veux bien dire Que vous soyez fidèles ou bien simple passant Et que nous en soyons juste au premier sourire Sachez ce qui, pour moi, est le plus important Oui le plus important
Écrire pour ne pas mourir Écrire, sagesse ou délire Écrire pour tenter de dire Dire tout ce qui m'a blessée Dire tout ce qui m'a sauvée Écrire et me débarrasser Écrire pour ne pas sombrer Écrire, au lieu de tournoyer Écrire et ne jamais pleurer Rien que des larmes de stylo Qui viennent se changer en mots Pour me tenir le cœur au chaud
Que je vive cent ans ou bien quelques décades Je ne supporte pas de voir le temps passer On arpente sa vie au pas de promenade Et puis on s'aperçoit qu'il faudra se presser Que vous soyez tranquille ou plein d'inquiétude Ce que je vais vous dire, vous le comprendrez En mettant bout à bout toutes nos solitudes On pourrait se sentir un peu moins effrayé Un peu moins effrayé Écrire pour ne pas mourir Écrire, tendresse ou plaisir Écrire pour tenter de dire Dire tout ce que j'ai compris Dire l'amour et le mépris Écrire, me sauver de l'oubli Écrire pour tout raconter Écrire au lieu de regretter Écrire et ne rien oublier Et même inventer quelques rêves De ceux qui empêchent qu'on crève Quand l'écriture, un jour, s'achève
Qu'on m'écoute en passant, d'une oreille distraite Ou qu'on ait l'impression de trop me ressembler Je voudrais que ces mots qui me sont une fête On n' se dépêche pas d'aller les oublier Et que vous soyez critique ou plein de bienveillance Je ne recherche pas toujours ce qui vous plaît Quand je soigne mes mots, c'est à moi que je pense Je veux me regarder sans honte et sans regrets Sans honte et sans regrets
Écrire pour ne pas mourir Écrire, grimace et sourire Écrire et ne pas me dédire Dire ce que je n'ai su faire Dire pour ne pas me défaire Écrire, habiller ma colère Écrire pour être égoïste Écrire ce qui me résiste Écrire et ne pas vivre triste Et me dissoudre dans les mots Qu'ils soient ma joie et mon repos Écrire et pas me foutre à l'eau Et me dissoudre dans les mots Qu'ils soient ma joie et mon repos Écrire et pas me foutre à l'eau