mardi 15 septembre 2020

toutes voiles dehors



"Celui qui attend que tout danger soit écarté pour mettre les voiles ne prendra jamais la mer."
Thomas Fuller


"Ceux qui ont inventé le bateau à vapeur. Que savent-ils du vent qui gonfle les voiles?"
Seyrani







A LA CARTE

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Chez: LUNDI MATIN

Cesare Battisti : nous persistons

Nous persistons à défendre Cesare Battisti, contre les forces politiques qui, de la France au Brésil, de l’Italie à la Bolivie, ont fait de lui le jouet d’un antiterrorisme fantasmatique, de surenchères sécuritaires et d’un justicialisme qui confond la justice avec un populisme pénal nourrissant la vengeance infinie des Etats.
Cesare Battisti a été enlevé en janvier 2019 en Bolivie, dans des circonstances étrangères à toute forme de droit international et national. [1] La mise en scène télévisée de son atterrissage à l’aéroport de Ciampino, où il a été accueilli par le ministre de l’Intérieur d’extrême-droite Salvini et son soutien « 5 étoiles », déguisés en policiers, a choqué jusqu’au Conseil supérieur de la magistrature italienne. Depuis maintenant 40 ans, Cesare démontre qu’il a renoncé à toute activité clandestine et violente et on lui applique rétroactivement un régime antiterroriste qui lui interdit tout contact avec d’autres détenus et le maintient à l’isolement 24 h sur 24. Cela se passait dans la prison d’Oristano, dans des circonstances telles qu’il devait choisir entre prendre son repas de midi ou la « promenade » dans un espace restreint. C’est pourquoi, au début de la semaine dernière il avait entamé une grève de la faim.
En fin de semaine, il a été transféré en Calabre, dans la prison de Rossano où on le maintient toujours sous le régime dit AS2, réservé aux terroristes : il y sera en compagnie de 18 prisonniers d’Al Qaeda ! A cette heure, nous ignorons s’il poursuit sa grève de la faim.
Sa persécution par l’administration pénitentiaire fait l’objet de plusieurs plaintes. L’arbitraire exorbitant qu’il subit n’a strictement rien à voir avec une éventuelle dangerosité : on ne lui pardonne pas d’avoir essayé d’échapper à la vengeance d’Etat et c’est pour cela que nous persistons à le défendre.
Nous persistons à défendre Cesare Battisti, non pas parce qu’il serait innocent, parce qu’il serait écrivain ou parce qu’il serait sympathique, ou toute autre raison, mais parce que, de par son histoire, il appartient pleinement à cette fraction de la population italienne, jeune et moins jeune, qui, dans les années 70 du siècle dernier, est entrée pendant une décennie en sécession avec la vieille société, sa soumission au capitalisme débridé et ses forces politiques institutionnelles. Cette sécession a pris aussi une tournure violente, et si on doit critiquer la forme politique que cette violence s’est donnée, et les discours idéologiques qui allaient avec, il convient d’observer que cette violence était le fait de toute la société italienne, en particulier des forces de l’ordre et des Services secrets. Les attentats aveugles, de loin les plus meurtriers, étaient le fait d’une extrême-droite largement infiltrée et manipulée par les services étatiques. C’est notamment parce que, avec ses romans, Cesare Battisti a rappelé la réalité d’une époque mythifiée sous le vocable « années de plomb », que les représentants des forces politiques attaquées à l’époque, qui n’ont jamais cessé de gouverner ensemble ou séparément, se sont acharnées sur lui, soutenus par des médias en mal de monstres et par les pestes émotionnelles d’une opinion manipulée.
Nous persistons et persisterons à soutenir Cesare Battisti dans sa bataille pour obtenir que ses droits lui soient rendus, notamment, dans un premier temps, celui à une détention « normale ». Nous le soutiendrons dans son combat pour obtenir auprès de l’ONU et du Conseil de l’Europe que soit reconnu le caractère illicite de son enlèvement et de sa détention. Nous persisterons à défendre l’idée que la société italienne a tout à gagner à regarder en face son passé et à s’acheminer vers l’amnistie des délits politiques des années 70.
 Premières signatures  : Isabelle Alonso, écrivaine et chroniqueuse ; Jean-Pierre Bastid, écrivain ; Luca Belvaux, cinéaste ; Stéphanie Benson, écrivaine ; Eric Beynel, porte-parole de la confédération Solidaires ; Laurence Biberfeld, écrivaine ; Jean-Pierre Bouyxou, critique de cinéma ; Eric Brun, sociologue ; Jean-Marie Buchet, cinéaste ; Pierre Carles, cinéaste ; Jean-Louis Comolli, cinéaste ; Anne Crignon, journaliste (Le Nouvel Observateur) ; Elsa Dorlin, philosophe ; Gérard Delteil, écrivain ; Pascal Dessaint, écrivain ; Jean-Michel Devésa, professeur des universités, écrivain ; Patrick Dewdney, écrivain ; Sylvain Garel, ancien président du groupe écologiste à la Mairie de Paris ; François Gèze, éditeur ; Alain Jugnon, philosophe ; Chantal Junius, retraitée ; Hervé Le Corre, écrivain ; Marin Ledun, écrivain ; Gilles Martin-Chauffier, écrivain et rédacteur en chef de Paris-Match  ; Chantal Montellier, écrivaine et bédéiste ; Patrick Mosconi, écrivain ; Jean-Jacques M’U, éditeur ; Gilles Perrault, écrivain ; Serge Quadruppani, écrivain et traducteur ; Nathalie Quintane, écrivain ; Patrick Raynal, écrivain, ancien directeur de la Série Noire ; Vincent Ruyschaert, thermicien ; Elisa Santanella, maître de conférences en études italiennes ; Alessandro Stella, directeur de recherches au CNRS ; Charles Tatum Jr, traducteur, éditeur ; Rémi Toulouze, éditeur ; Patricia Tutoy, sociologue ; Jo Vargas, peintre ; Gilbert Oscaby, retraité…
Pour signer cette tribune, vous pouvez vous rendre sur la plateforme Change.org en cliquant ici.

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"La pire chose qui puisse arriver à un révolutionnaire c'est de prendre le pouvoir."
Cesare Battisti 






"Je n'ai pas de goût pour l'héroïsme et la sainteté. Ce qui m'intéresse, c'est d'être un homme."
Albert Camus 



                                 

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Création:  JOS 
et JOS encore


" […] pour saisir une oeuvre d’art, rien n’est pire que la critique. Ils n’aboutissent qu’à des malentendus plus ou moins heureux. Les choses ne sont pas toutes à prendre ou à dire, comme on voudrait nous le faire croire. Presque tout ce qui arrive est inexprimable et s’accomplit dans une région que jamais parole n’a foulée. Et plus inexprimables que tout sont les œuvres d’art, ces êtres secrets dont la vie ne finit pas et que côtoie la nôtre qui passe."
Rainer Maria Rilke-extrait de "Lettres à un jeune poète"


lundi 14 septembre 2020

tendance


"Il faut se jouer des apparences"
Parole de mur


Changer de silhouette.
Miroir aux alouettes.
La forme touche le fond.
Coévolution

Dimanche soir

Après avoir pris le bac au Pellerin pour retraverser la Loire,
nos reporters à terre
traversent Saint Etienne de son Luc
puis à Savenay rejoignent la N471.
La route  vers la côte semble leur appartenir
alors que dans la direction  nantaise opposée,
sur des kilomètres, des files interminables de véhicules
roulant à petits pas...
Voilà sans doute le prix de la Riviera océanique
en ces temps z'épiques



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Lundi fait des histoires 

"Ouessant: emportée par la houle"


"Quand je lève la tête de mon carnet – je n’ai pas résisté à la tentation d’y croquer la façade rouge du «Fournil de Camaret» et de la boulangère, en train de tourner ses crêpes – c’est pour voir qu’au loin, une file a commencé à se former. A vue de nez, une centaine de personnes se presse sur l’embarcadère. Il est plus que temps d’y aller.
Le port est très tranquille à cette heure : l’eau est étale et offre un miroir presque parfait au ciel impressionniste du petit matin. Comme je m’approche, je comprends que nous serons très nombreux à bord du bateau qui doit nous conduire à Ouessant, ma sœur et moi.
Pour une Bretonne qui aime répéter combien les îles la fascinent, je méconnais encore nombre des rochers plus ou moins habités qui ponctuent la côte atlantique. C’est Ouessant qui s’est dessinée au fil des semaines de ma vie confinée, en cet étrange début d’année 2020. Je me suis prise à rêver, oui comme beaucoup, des embruns qui font friser les cheveux, de la course avec les vagues, des pieds qui s’enfoncent dans le sable et même de l’odeur de marée basse qui fait pourtant froncer mon nez. Mon corps confisait à Grenoble tandis que naissait dans ma tête un lieu loin des immeubles et des montagnes, traversé par les rafales et les vagues, un lieu pour m’échapper, un lieu où j’emporterais un carnet pour dessiner et une carte pour me perdre, où je marcherais. Un rêve romantique. Un rendez-vous pour plus tard.


Nous prenons place dans la queue. Ça parle anglais, allemand, français : il y a des jeunes et des beaucoup moins jeunes qui se pressent, se serrent, veulent être les premiers à monter (ou en tout cas pas les derniers) dans l’espoir de trouver une place sur le pont, à l’étage. L’un des membres de l’équipage intervient rapidement : les masques sont obligatoires et le respect des distances de sécurité aussi. Il ajoute «dans la mesure du possible» et ça en fait rigoler certains, d’un rire un peu jaune, car le bateau est complet. «Faites au mieux», qu’il bougonne.
Je trouve une place au rez-de-chaussée – ou au rez-de-mer ? – près d’une fenêtre. La traversée est commentée et l’équipage égrène, entre deux passages de dauphins, les poncifs sur les insulaires et des dictons bretons qui font se gondoler les passagers dont on voit seulement les yeux rire, derrière les masques et les capuches des cirés. Une dame s’assied bientôt à côté de moi, chargée de bien plus de bagages qu’elle ne peut en porter elle-même. Elle aussi tient des carnets de voyage, mais ne dessine pas car «on ne peut pas avoir tous les talents !». Elle fait partie d’un groupe voyageant avec un tour-opérateur, mais attention, quelque chose de petit, de local, qui fait attention.
Un peu plus tard, le bateau nous déverse sous une ondée qui a tôt fait de balayer l’île avant de s’en aller comme elle était arrivée : furtivement.


A Ouessant, je respire. Le sol de l’île est tourbeux, souple et élastique, il rebondit presque sous nos pieds. La nuit tombe si tard, le soir, que je n’ai jamais besoin d’utiliser ma lampe : bonheur de lire à 22 h 30 à la lumière du soleil couchant. Les mûres sont noires et un peu âcres. L’eau n’est «pas froide, elle est fraîche» : c’est quelqu’un qui le dit depuis la crique où il se baigne, dissimulé derrière un repli rocheux qui le soustrait à notre vue. Plus tard, nous nous abritons d’une averse brutale derrière les murs d’une vieille maison de pierre dont le toit a disparu – le vent est si fort que la pluie tombe presque à l’horizontale, alors le mur nous suffit amplement.
Un matin, très tôt, je recroise la dame qui était assise à côté de moi dans le bateau. Elle marche sur le sentier qui sinue le long des falaises avec son groupe d’une dizaine de pèlerins, en route nous dit-elle vers un petit-déjeuner apparemment bien mérité (les joues sont rouges et les souffles courts) à Lampaul, le (seul) bourg de l’île. C’est un matin brumeux et froid où le clocher de l’église disparaît dans les nuages, un matin où j’aurais presque pu me croire seule.
Mais ici comme sur le continent, n’en déplaise à mes idéaux romantiques d’île bretonne qu’un géant aurait égarée dans l’océan vert-de-gris, ici comme sur le continent, on est rarement seul.


L’une des serveuses du bar-café-boulangerie me dit quelques jours plus tard qu’il n’y avait pas eu autant de touristes depuis des années sur leur petite île. Elle est désabusée, en colère contre les gens «qui s’en foutent». Il faut les comprendre : ils sont coupés de tout, il y a plein de choses qui leur manquent, aux Ouessantins. A une heure de bateau depuis le port du Conquet et à deux de Brest ou Camaret, ils sont loin du monde mais aussi de certains de ses maux. Alors les six bateaux qui, depuis la mi-mai, débarquent chaque jour au port du Stiff plus de mille touristes qui veulent chacun leur part de nature sauvage, de «beau temps plusieurs fois par jour», de solitude et d’espace, ces six bateaux et ces mille touristes, soit plus que le nombre d’habitants sur l’île, ça la fâche.
Bien sûr qu’on se réjouit que les gîtes et les restaurants soient remplis : ça aide à rebondir après ces mois difficiles. Mais voilà : certains ne font pas attention et le fait est que l’on dénombre désormais trois cas de contamination au coronavirus. Rien de trop grave pour l’instant, mais trois cas tout de même sur une île pourtant coupée de tout et majoritairement peuplée de personnes âgées. Ma serveuse est dépitée. «On se croyait protégés, mais en fait… non.» Voilà des semaines qu’elle a cessé d’embrasser ses grands-parents. Et elle m’explique, sans deviner combien je la comprends, comme c’est difficile de ne plus se toucher quand on vit tous sous le même toit.
Il est ardu de fuir le monde, même un peu. J’avais plagié Piaf en quittant Camaret-sur-Mer : «Emportée par la houle…» J’avais voulu me croire en route vers un refuge dans l’océan, vers un caillou-sanctuaire, vers une île-parenthèse, à bord du Fromveur II et de son drôle d’équipage. Croire à un monde sous cloche, hors de l’espace et hors du temps, avec les nuages infinis, les chemins qui tortuent, les cheveux qui frisent, les falaises qui tombent et les phares qui jalonnent l’horizon, mais sans les autres dont je fais pourtant partie, sans les «fâcheux», sans les mètres de sécurité et sans les masques. Sans le Télégramme qui titre : «Tourisme et Covid-19 : Comment les îles bretonnes font face».
Croire – mais y ai-je jamais vraiment cru ? – à une carte postale en quatre dimensions. Ouessant comme un mirage en plein épisode de tempête. Un mirage, peut-être. Mais un mirage très charmant."
  Alice Quistrebert-texte et illustration pour Libération Voyages

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 Traditionnel distance sied à l'oreille:



Un port
export





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 Sur le sable
"ce petit reflet
caché tout au fond des yeux
un bouton de nacre
ce parfum iodé
un tressaillement de joie
échoué sur la peau"
Christine Saint-Geours- "Dune"
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