jeudi 28 mai 2015

la nostalgie camarade




Jean barque
sans rassurer mes arrières
à la Banque route.

Travelling pelliculé 
Humphrey beau gars et Ingrid belle dame.

Le piano bar ça se pêche mieux  dans le décors que les grandes orgues de Staline
ou  "Notre ami le roi" des comptes de Perrault
Tu crois pas?

Casablanca
mangé au mythe
Black and White
ou
Gwenn ha du blended dans sa version bretonne.
Dame, finalement à sec ou plein les poches on revient toujours au port de l'angoisse,
là où les rats quittent le navire
là où l'on se fait son cinéma
les soirs de mer tume
en se prenant pour un Hemingway
qui  chercherait son Ernestine
tout en suçant des pastilles Vichy.

Silence on tourne.
Paré à virer
envoyez!

Moteur!

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Comme dans un film américain
illustration-paroles et musiques
proposées par Lady C. :

    illustration: Nightwaks -Edward Hopper-

Nigthawks, 1942

Phillies' La dernière séance de la femme à la robe rouge.

"C'est un ticket qu'elle tient dans la main. Un ticket bleu. Un ticket de cinéma. Elle le tourne et le retourne entre ses doigts. Elle n'est pas vraiment là. Elle est encore dans la salle. 
C'était la dernière séance. Ils sont sortis du cinéma il y a 20 minutes, ils ont marché un peu au hasard, silencieux, et soudain au croisement de 2 rues sombres, les grandes baies vitrées se sont imposées à leurs yeux fatigués tel un diamant jaune au milieu d'émeraudes. Un endroit idéal, un seul client et le garçon qui s'affaire derrière le comptoir. Sans doute sur le point de fermer, il range un peu et lave les dernières tasses. Il est tard. La femme rousse a posé son manteau sur le tabouret d'à côté, elle a un peu froid, pourtant ce n'est pas l'hiver, pas encore. Elle repose ses coudes sur le bar en acajou presque chaud. La couleur cirée a la même teinte que ses cheveux. Elle se penche, un peu en appui, et allonge bien à plat son avant bras pour mieux sentir la douceur du bois sur sa peau nue.
Elle n'est pas vraiment là, elle se voit, son compagnon à ses côtés et cet autre homme plus loin isolé dans ses pensées, elle entend le tintement étouffé des tasses qui s'entrechoquent. Aucune des quatre personnes n'a envie de parler, ils sont épuisés, tellement seuls. La nuit dehors est profonde qui les enveloppe, même ici sous cet éclairage cru, la nuit dehors les pénètre jusqu'aux os. Elle ressent dans son corps, dans ses battements de cœur ralentis, le temps qui passe et étire ses minutes, le temps qui prend son temps et s'écoule ainsi que les grains de sable d'un sablier. Tout a un éclat étrange et le silence est plus épais. 
C'est souvent ainsi après un bon film, on reste encore sous l'œil de la caméra. Les éléments du décor qui nous entourent ne semblent pas vraiment à leur place et s'agencent différemment, il y a une légère distorsion et l'on a du mal à accommoder sa vision.
Elle tourne et retourne le ticket bleu entre ses doigts. Elle n'est plus là.
Elle est dans la salle aux fauteuils rouges. Rouge aussi le velours du rideau de scène. Et rouge encore la robe qu'elle a choisie. 
Le cinéma c'est grand. Grand comme un écran. Grand comme un visage en gros plan. Grand comme des yeux mouillés, une bouche qui tremble. Plein écran. Tout est bizarrement distordu, on croit suivre un long travelling alors qu'il s'agit d'un plan séquence presque immobile, rythmé à un battement de cils. Assise dans le noir, à côté de son homme étrangement distant, elle est seule avec l'image qui s'incruste en miroir sur son iris. Et ce sont ses yeux qui pleurent, sa bouche qui se tord. La tristesse la terrasse, elle s'y abandonne volontiers puisqu'elle sait que ça ne durera pas. Elle s'enfonce dans son fauteuil, agrippe fortement les accoudoirs. Le temps d'un gros plan, 1, 2, 3 secondes… et cela lui fait du mal, cela lui fait du bien. Il lui est impossible de résister à la musique, au rythme des images qui défilent puis se figent. C'est angoissant de perdre le contrôle mais rassurant tout autant. 
Le cinéma c'est vivant. Intensément vivant. Divinement brillant. Lorsqu'ils ont quitté la salle, ils sont passés devant l'ouvreuse qu'elle avait remarquée, songeuse et appuyée au mur pendant la projection. Elle a pensé que cette fille était aussi belle qu'une actrice. Ils ont franchi le hall lumineux et se sont perdus dans la nuit, leurs longues ombres s'allongeant jusques aux trottoirs."   
Lady C. 

 

mercredi 27 mai 2015

toute ressemblance avec...serait...





"Pas la peine de nous faire cette tête de condoléances, de hausser les épaules, de froncer les sourcils, de lever les bras au ciel ou de vous gratter le menton, l'oeil goguenard.

Ni de filer en douce.

ça existe encore, des poètes?
Mais il y en a aujourd'hui plus que la terre n'en a jamais portés, hommes ou femmes, jeunes ou vieillards, parleurs ou chanteurs, faiseurs de livres ou crieurs des rues et je parie qu'il n'y a pas de lieu au monde, de l'Afrique au Groenland, de la Sibérie aux Caraïbes, qui n'ait pas ses poètes.

Vous voulez savoir à quoi ça ressemble, un poète? Mon Dieu, à rien de particulier! ça ne se porte pas sur le visage. Pas d'uniforme et pas d'insigne à la boutonnière. Pas de diplômes et pas de médailles. C'est dedans que ça se passe. Si ça se reconnaît, c'est peut-être à une certaine façon de parler des choses, même les plus ordinaires: plus secrète, plus grave, plus étonnée ou plus gourmande. en prononçant chaque mot comme s'il en valait mille, comme s'il disait bien ce qu'il dit mais aussi mille fois plus encore.

Des rêveurs? Des songe-creux, des vagabonds, des pas-comme-les-autres, qui marchent sur les eaux ou qui volent dans les nuages avec les oiseaux et les anges?
Alors là non, faites excuse, mais vous n'y êtes pas du tout.
Un poète, ça fait ses courses et ça a mal aux dents, ça se soucie de chômage et du Sida. Et quand il écrit des poèmes, il parle des choses les plus banales, qui sont celles de tout le monde: de ses doutes, de ses joies, de ses colères, de ses peurs, de ses défaites, de ses étonnements, de son désir d'être autre chose, d'être autrement, de ce qu'il ne comprend pas, de ce qu'il croit comprendre, dans les instants de sa vie qui sont les instants de tout le monde.
Non seulement le poète ne vit pas ailleurs, dans un beau rêve lointain, mais il n'y a pas plus passionné, plus curieux de ce qui se passe en lui et autour de lui.

La différence, il y en a une, c'est qu'il prend le temps d'y penser, de s'interroger, d'en parler: comme un enfant qui s'arrête devant le plus bête des cailloux sur le chemin et reste là, une heure peut-être, à le tourner et le retourner, dans ses mains, à le peser, le caresser, le lancer, le regarder avec des yeux ronds comme des melons;

ça ne sert à rien.
Strictement à rien.
A rien en tout cas de ce qu'on dit important dans notre drôle de monde:
ni à être connu, ni à gagner de l'argent, ni à devenir chef, ni à réussir dans la vie, ni à arrêter les guerres, ni à donner du pain à ceux qui n'en ont pas.
Mais sauf votre respect, à quoi ça sert de dire "aïe!" quand on reçoit une pierre sur le pied, ou "je t'aime" à un beau visage? 
Et comment faire pour ne pas le dire?
.../..."

-Jean-Pierre Siméon- extrait de "Aïe un poète" Cheyne Editeur





"Je sais que la poésie est indispensable mais je ne sais pas à quoi."
Jean-Cocteau-








découvert chez: "Dormira jamais"

"C’est du noir que l’on vient. Du manque de profondeur, de cette sérénité qui lentement dégorge du bois de la jetée. Un soleil timide apparaît et essore le ciel. Les dernières gouttes de pluie semblent agripper l’horizon, s’accrocher à ces instants sombres que le corps couve secrètement, les ramener à quai. Pourtant on ne bouge plus. On cherche à distinguer le phare dans les vapeurs d’obscurité. Et quand un rayon sans éclat s’étire sur l’océan, c’est tout le matin qui remonte. Les pieds font des traces rouges dans le sable. Les yeux se décollent des rêves. Et la mélancolie reste suspendue loin derrière. Comme baignée d’absence. Rincée par la lumière." 
-Jean-Baptiste Pedini- extrait de: "Plein phare"
A paraître aux Editions La Porte





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