vive nous

 

"N'aie pas peur de le dire

je suis un immigré

un boat-people une passe-frontières

un moins que rien

l'auteur de tous les maux

où qu'il porte ses pas

Je suis celui qu'on fait chercher parfois

puis qu'on renvoie chez lui

avec plus ou moins de prévenances

quand plus à rien il ne sert

N'aie pas peur de le dire

je suis un homme-kleenex

une femme papier-cul

un moucheron qu'on expulse

du revers de la main

un nuage que l'on crève

laisse-t-on croire au bon peuple

pour rallumer le soleil

indocile et distrait

Je suis celui qui vient

frapper à ta porte à l'heure où tu dînes en famille

chassé par les mille tsunamis

de sa propre demeure

celui qui ne t'empêche pas

de continuer ripaille

et à qui par moments

tu balances quelques miettes

réfugié derrière ton bouclier cathodique

Je suis celui

qui a défié les éléments

pour venir à ta porte

 

n'aie pas peur de le dire

n'aie pas peur

je suis une immigrée

un juif errant ou presque

car le juif désormais

a une soukka où planter son errance

je suis une palestinienne

une tibétaine...sans nom

une haïtienne avec ses rêves en jachère

qu'on refoule de partout

 

Je suis celle qui toujours

revient ou arrive

quelque part

celle dont l''accent

sonne d'ailleurs

si ce n'est de nulle part

même lorsqu'elle fait semblant

d'être ici ou de là-bas

 

Je suis celle

qui tangue terre ferme

quand tous font voile

vers le grand large

qui s'arrime en haute mer

quand la vie tisse rhizomes

 

N'aie pas peur de le dire

n'aie pas peur

je suis un être humain

ton frère ou ta soeur

peut-être"

Louis-Philippe Dalembert  extrait de: "Cantique du balbutiement Editions Bruno Doucey

 

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DANS LE TEXTE

"Je m'adresse aujourd'hui à toute la Maison. [....]

Je veux leur parler d'un sujet que nous n'avons pas le droit de passer sous silence: c'est celui des excès dans l'emploi de la force.[...]

Nous gagnerons peut-être la bataille dans la rue, mais nous perdrons quelque chose de beaucoup plus précieux et à quoi vous tenez comme moi: c'est notre réputation[...]

Frapper un manifestant tombé à terre, c'est se frapper soi-même en apparaissant sous un jour qui atteint toute la fonction policière."

Maurice Grimaud, lettre adressée à chaque policier parisien le 29 mai 1968

Source: L'Histoire n°448 avril 2018 

 

 

                                         ça rime en ON

                                                                     au  derrière d'un camiON

  sur le frONt de l'amer 

 

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