Chez:" Flog peau à tiques" j'ai découvert et aimé le texte qui va suivre
"j'écris
sans voir parfois et sans boire mais comme si j'avais bu, comme si
j'avais vu , comme si j'avais vécu, vécu toutes ces
existences lues dans les livres peut-être et comme si j'avais tout
compris et sans rien n'en savoir, avec ce refus de savoir quoi que ce
soit, j'écris comme une nouvelle-née, un rat
aveugle,une ombre craignant la clarté, j'écris comme si j'étais dieu
ou déesse, érotique ou sans fesses, avec la rage d'en découdre avec les
mots qui m'assiègent, avec la crainte qu'ils
m'emportent dans un néant de folie, avec peur et fascination à la
fois, avec mes frères et soeurs par-dessus mon épaule qui veillent et
m'encouragent même s'ils écriraient autre chose,
quand bien même ils n'approuveraient pas tout, avec un écureuil lové
au creux de mes bras et une tortue d'Herman désséchée dans un coin de
mon crâne, tortue de famille gagnée par mon père à une
fête foraine, lente et coriace et sans doute à l'image que je me
fais de moi même, j'écris sans rien savoir du succès ou de
l'indifférence, en voulant oublier les versets inconsistants qui
devaient m'éduquer, j'écris pour tuer tous dieux, tous pères, toutes
mères mais les aimant, j'écris comme je jouis, avec langueur, fougue,
patience et volonté, j'écris pour retrouver la
jouissance au travers des mots, leur arracher leurs mystères, leurs
sons, leurs rythmes, en apprendre quelque-chose à leur insu, à mon insu
et le partager car sinon, à quoi bon, à quoi bon
noircir, encrer, raturer, jeter et recommencer si ça n'est pour
extirper de l'inconnu, quelques sagesses, tendresses et plaisirs,
j'écris sans doute pour maintenir mon désir, celui d'être
ici et de le dire, celui d'être autre parmi vous, d'être avec vous,
identique et unique à la fois...
j'écris et mes mots me font peur souvent, je les cache, les retiens, les crache et me maintiens, j'écris sans gérer mon image,
avec l'effroi qu'elle m'échappe puis j'écris pour lutter contre ces idées-là...
j'écris pour danser, nue et sauvage comme la Manon des sources et pour la retrouver même sous une image à trop grande bouche,
toujours belle et désirable.
J'écris pour m'accrocher au phallus et toujours croire à la communion de nos sains.
J'écris pour ces mots des autres:
" L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit."
Aristote
Aristote
"On ne tue pas un rêve, on n'assassine pas un subterfuge. Ce serait plutôt lui qui nous tue, car Dieu met à mort tout ce qui lui résiste. En premier la raison, l'intelligence, l'esprit critique."
Michel Onfray / Traité d'athéologie
J'écris pour ceux qui m'enseignent et me tirent de l'obscurantisme.
J'écris pour m'arracher aux époux vampires et aux libertins pervers qui nous sucent, nous dévorent et croyant
aimer, nous détruisent et nous font saigner.
J'écris pour arracher des hommes brandissant des haches et des lois perverses, j'écris pour démonter le monde du
profit, pour crier l'amour sous des échos de ruine.
J'écris pour affronter mes faiblesses, pour me renforcer sans m'endurcir, pour vous nuancer sans me soumettre,
pour que vous me respectiez sous mes flots de lettres.
J'écris pour que vous lisiez des femmes, pour que vous liez vos flammes.
Et j'écris encore pour compter quelque part et pour quelqu'un et pour que vous aussi regardiez vos miroirs et y
voyez un peu de ce noir qui ne me pèse plus.
J'écris pour mes filles, pour leur écrire ce que je ne sais exprimer.
J'écris pour moi et pour toi aussi et je n'en veux que le pouvoir de l'avoir écrit.
J'écris pour être libre et indépendante, pour m'échapper de toutes vos influences, pour devenir et
rester moi, pour penser sans aucun roi.
J'écris pour écrire encore, pour creuser une fontaine et y boire à mes sources, pour chercher dans ses reflets
un peu de poésie.
J'écris pour avoir la force d'agir, pour mettre un pas devant l'autre, pour m'éloigner du médiocre,de
l'inconsistant, du laid et du vil.
J'écris pour continuer à voir la beauté et l'amour sous des montagnes de gravats, pour croire en nous envers et
malgré tout.
J'écris pour murir et sans mourir, pas tout de suite,pas écrasée par vos suites obscènes.
J'écris pour me battre, contre vous, contre moi mais sans aucune arme à la main.
J'écris pour me battre, sans aucune larme dans les yeux, pour combattre les narcissiques sans émois et nous
donner des raisons d'espérer.
J'écris pour ma mère malade d'angoisse et pour mon père pareil qui s'est détruit à force de boissons, j'écris
pour leur lente agonie, la première sans morphine et le 2ème avec sa sale bobine de vieillard prématuré.
J'écris pour qu'une oreille au moins m'entende, pour combattre les hyènes et les chacals qui se nourrissent des
autres.
J'écris contre tout profiteur, tout arnaqueur et tout guerrier. J'écris parfois contre des avocats, des
dentistes ou des banquiers.
J'écris pour survivre et garder mon rire.
J'écris pour vous dire que la mort pourrait bien me surprendre, j'en rirai encore si elle m'en laisse le
temps.
J'écris contre les sadiques ou les masochistes.
J'écris contre les religions même si je comprends vos besoins d'immortalité.
J'écris pour rendre un peu de ce vous m'avez appris.
J'écris contre mes employeurs indélicats et malhonnêtes, bien souvent catholiques et de droite, contre les
entreprises libérales qui nous exploitent, contre un système qui nous écrase et nous affame.
".../...Nous contenons tout
mélancoliques
et hardiment repris
par l'instant
quand notre bouche s'ouvre
à l'éveil
oui à la mélancolie du monde
et oui encore
à l'autre nom de la beauté
ton visage
nous voici posés sur l'incertain
un coup d'aile et son regret
et tôt venue
la lumière qui décide
un ciel cache un ciel
dans tes yeux
où seul l'amour est possible
tes yeux sont le second poème
.../...
Chaque pli du matin
chaque froissement du réveil
c'est cela
parfums sous la mort même
qui nous retient
ce fragile gréement de l'air
qui fait passer les corps
sur l'autre bord de la folie
où l'on s'efface
où peut-être bien l'on s'efface tout à fait
pour n'être l'un à l'autre
qu'une mer lointaine
et sa rumeur
rumeur jalouse
dont le poème dit l'essor
amour contraire
à tout ce qui se répand
sans être
et la rumeur encore est le poème
.../..."
extrait de- Poèmes du matin-"Fresque peinte sur un mur obscur"Jean-Pierre Siméon-Cheyne Editeur
"Au large les barges se gondolent dans le roulis
Ici on cuit au bain-marie
Un coup j'te lave un coup tu m'essuies
Ici on se botte
On se débecte
Et les mouettes se délectent
De nos anecdotes
Au large les barges se gondolent dans le roulis
Ici on suit des bikinis
Les jours de grève le sable s'ennuie
On se prélasse
Dans les grandes surfaces
Là où se pressent les huiles
Et les bigorneaux
J'écume
J'm'enrhume
J'ai qu'une idée
Eternuer
Te retourner le canoë
Etre le dernier à s'éterniser
Sur ton corps alangui
J'écume
J'm'enrhume
Au large les barges se gondolent dans le roulis
Ici on jouit du clapotis
Du bord de mer dans mon jacuzzi
Du premier jet
J'ai tout gardé
Puis j'ai mélangé
Le léger le corsé
J'ai qu'une idée
Eternuer
Te retourner le canoë
Etre le dernier à s'éterniser
Sur ton corps alangui
J'écume
J'écume
J'm'enrhume"
-Alain Bashung-
Superbe page !
RépondreSupprimerje suis tout essoufflée d'avoir parcouru toutes ces lignes !
RépondreSupprimerles images sont apaisantes et belles
et Bashung parti trop vite a laissé des traces et des mots!
superbe page c'est vrai
Merci beaucoup pour vos félicitations Madame, Monsieur et comme je ne suis qu'un des contributeurs à l'affaire je partage avec grand plaisir vos encouragements avec les autres participants
RépondreSupprimerBeau week-end à vous