mardi 10 août 2010

L'ART DOIT TOUT EMBRASSER

 Proudhon par Courbet


"La pauvreté vous chagrine; ce labeur de cheval aveugle attaché au manège vous fait mal à voir. Vous admettez la tragédie, les infortunes éclatantes, le malheur héroïque; mais vous demandez s'il est de la dignité de l'art de reproduire ces vulgaires souffrances./...
Et voilà justement en quoi consiste votre erreur, l'erreur de toutes les écoles d'art depuis le commencement du monde: vous voulez séparer ce qui est en soi inséparable de la lumière des ténèbres, l'esprit de la matière, la forme de la substance, la beauté de la laideur, le plaisir de la peine, l'art de la science et de l'industrie, l'idéal de la conscience, la jouissance du travail et de la maladie, la liberté de la servitude, la vie de la mort, la gloire de l'humiliation.
Vous ne savez pas que la vie humaine se compose incessamment de l'union de vos contraires, mêlés à divers doses. Vous vous êtes fait un type des dieux et un type de l'homme, un type de l'aristocrate et un type de l'esclave; vous avez rêvé une existence de perfection et de béatitude, et une autre de damnation et de supplice; et vous avez dit ceci: Ceci est l'Idéal, le Paradis, l'Art ; et cela est la Réalité, la Barbarie, l'Enfer. Et vous avez ainsi proscrit les neuf dixièmes du genre humain, vous réservant l'idéal et les condamnant au travail. Nous rejetons vos catégories égoïstes; nous prétendons que l'art doit tout embrasser, à peine d'infamie pour lui et pour vous."
Pierre-Joseph Proudhon-Du principe de l'art et de sa destination sociale-1865-

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