je suis sur un bateau amarré dans un port, une coquille de noix ballotée par la houle, où la drisse fouette sa bôme en orchestrant la nuit. Le calme n'est qu'apparence, un marin fait son quart, à moitié réveillé. Dans ses yeux creusés par de longues heures de veille se lit toutes les nuances d'un océan dormant mais qui pourrait soudain faire d'énormes colères. Personne n'est maitre à bord des émotions du vent, il se lève quand il veut et passe ses humeurs sur ce qu'il trouve en route. Je suis sur un rafiot qui parfois gite dangereusement mais en équilibriste habitué à ne pas faire de vagues, je sais qu'il lui en faut à ce foutu esquif. Je suis seul sur le pont et je parle aux étoiles quand elles ont un peu du temps, à m'accorder. J'écoute battre son coeur à ma barque fidèle, lui prenant le pouls quand je la sens fébrile et lui bordant les ailes frissonnantes sous la brume. Je suis comme je suis, marin de pacotille et je cherche à l'est des premières lueurs, qui chasseront les ombres, les rêves et bien des peurs. Je suis là pour la rime d'un passeur de lumière ébloui par le jour et ses mauvais esprits. Je suis de l'autre rive toujours et malgré tout, compagnon des mirages et de multiples chimères, je suis sans vraiment être qu'à côté de la flaque, au bord du bout du quai et de ses aventures, spectateur anonyme de la marche du monde quand il vit ralenti replié sur lui même. Je suis bien aux courants d'une côte de maille qui se disait amour pour mieux nous endormir et j'attends de pouvoir remonter la pagaille du jour qui peu à peu prendra place dans la mire.
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