vendredi 14 mai 2010
UN JOUR SANS
C'était un jour sans, d'ailleurs la semaine également et puis si cela continuait ainsi le mois serait tout autant à sec ou presque. On a pas l'habitude chez nous autres d'être ainsi, aussi longtemps, à l'abri de l'humidité. Bien sur les ceusses qui ne comprennent rien au caractère armoricain s'imaginent que pour sembler exister il faudrait repeindre en permanence- de janvier à décembre- le ciel en bleu...ciel, et ainsi ce serait le bonheur béat assuré. D'ailleurs ceux-là, on ne les voit guère par ici, et personne - à part quelque mercantile- ne les regrette vraiment . Qu'ils aillent donc avec notre bénédiction et pied au cul en prime s'il fallait, s'entasser vers des contrées touristiquement giboyeuses et qu'ils continuent de glousser sur le crachin qui nous fait les joues roses (t'es sur que c'est pas plutôt le muscadet?).
M'enfin là, on va finir par s'inquiéter et ...manquer d'eau-douce- faudrait pas que ça dure trop longtemps cette affaire, on va rouiller les articulations et dessécher la poésie à force. Heureusement il reste quand même quelques nuages pour jouer l'illusion et éviter la dépression car franchement rien de plus désespérant en celtitude qu'un ciel bleuâtre et vide, tout juste bon à remplir une carte postale de l'ailleurs avec l'original "il fait beau hein!, on a de la chance, pas vous hi!hi!hi!"
D'ailleurs... je suis parti une vingtaine d'années croyant trouver l'eldorado au pays des garrigues et...pas tout de suite, mais insidieusement, ...doucement ...je me suis peu à peu flétri de l'intérieur et il a fallu que je comprenne un jour qu'il me manquait la foutue pluie de mon pays et l'océan aussi mais ça, c'est une autre histoire...
Attention, personne ne vous dira par ici qu'il n'aime pas le soleil, mais plutôt bien élevé, à sa place, jamais dans la vulgarité bruyante et onctueusement dégoulinante avec ses chemises à fleurs de peau tiche.
On l'apprécie discret...Alors si j'ose dire, ça tombe bien, n'est ce pas!Bon, y vient ce grain ou merde?
.../...La pluie est une compagne en Loire Inférieure, la moitié fidèle d'une vie. La région y gagne d'avoir un style particulier car, pour le reste, elle est plutôt passe-partout. Les nuages chargés des vapeurs de l'Océan s'engouffrent à hauteur de Saint-Nazaire dans l'estuaire de la Loire, remontent le fleuve et, dans une noria incessante, déversent sur le pays nantais leur trop plein d'humidité. Dans l'ensemble, des quantités qui n'ont rien de considérable si l'on se réfère à la mousson, mais savamment distillées sur toute l'année, si bien que pour les gens de passage qui ne profitent pas toujours d'une éclaircie la réputation du pays est vite établie: nuages et pluie. Difficile de les détromper, même si l'on proteste de la douceur légendaire du climat - à preuve les mimosas en pleine terre et çà et là dans des jardins de notaire, quelques palmiers déplumés- car les mesures sont là: heures d'ensoleillement, pluviosité, bilan annuel. Le temps est humide, c'est un fait, mais l'habitude est telle qu'on finit par n'y plus prêter attention . On jure de bonne foi sous une bruine tenace que ce n'est pas de la pluie. Les porteurs de lunettes essuient machinalement leurs verres vingt fois par jour, s'accoutument à progresser derrière une constellation de gouttelettes qui diffractent le paysage, le morcellent, gigantesque anamorphose au milieu de laquelle on peine à retrouver ses repères: on se déplace de mémoire. Mais que le soir tombe, qu'il pleuve doucement sur la ville, que les néons des enseignes clignotent, dessinent dans la nuit marine leur calligraphie lumineuse, ces petites étoiles dansantes qui scintillent devant les yeux, ces étincelles bleues, rouges, vertes, jaunes qui éclaboussent vos verres, c'est une féérie versaillaise. En comparaison lunettes ôtées, comme l'original est plat.../..."
Extrait de: "Les Champs d'honneur" de Jean Rouaud-opus de mer
la vie n'a pas de prix et
richesse de la vie
au regard des fées mères
d'existence passagère.
Le matelot se cuisine à feu doux,
dans le bouillon, jusqu'au cou
Le reste est en surnage,
au sec,
pour lui tourner les pages
du livre des recettes,
épicées... à la lune,
assaisonnées miracle.
Vent dredi
Oh ma bouée béniguet
se cache sous la dune
l'opus de mer...
jeudi 13 mai 2010
JE NE SUIS PAS CASSANDRE...
(photo sur toile)
Marie, elle écrit -il me semble- dans l'urgence de l'écriture-Et d'ailleurs je comprends tout à fait cette envie que dis-je nécessité . Marie a du rentrer en poésie comme en religion et chaque jour -son blog- apporte son lot d'histoires, d'émotions, d'écorchures...de magie du Verbe...
Ce mercredi j'y ai lu ce qui suit et que je verrais bien -rêvons un peu-comme préambule à une constitution qui placerait l'Humain (si fragile) au centre de ses préoccupations...
"Je ne suis pas cassandre prophétesse troyenne,
ni zarathoustra,surhumaine grandiose et décadente,
ni zaza, ni toto, ni zozo, ni zorro,
mais j'entends et je sais bien pourquoi le bruit des bottes
en écho dans les rues,
je ne suis à l'abri et sans abri et sans habits qu'avec quelques mots,
dérisoire et futile,
la boulangère aux généreuses miches vendra son pain
aux chiens pour ses enfants, ou pour elle même,ou pour rien,
pour la peur, pour un jour de plus, pour son ventre et ceux des siens,nous serons plongés la tête et la bidoche dedans le pétrin , dans un noir si complet
que nous ne retrouverons plus un seul de nos mots intact de tous ces maux ,plus un seul de nos petits, ni de nos grands.
je ne sais pas ce que je vaux , graine de haricot,mauvaise graine,vendeurs de mots,
vendeurs de peur, vendeurs de peau, marchand, marcheur, démarcheur, expliqueur, démonstrateur, démonteur remonteur ,graine de héros, certains croient tout posséder, d'autres croient qu'ils ne possèdent rien,ah posséder...Sa maison, son jardin, sa femme, son homme, son chien, ses poils au sec, ses poissons rouges son livre son book, Je ne sais rien , si peu que j'en pleure.
Certains s'agitent, d'autres pensent, doutent, prient,possèdent, espèrent,comptent,soustraient, ajoutent, sa boutique , son expo divisent,considèrent,envisagent, étalagent,appuient sur tous les boutons, pleurent, grincent, décollent, atterrissent .
Savons nous seulement ce que nous sommes.
L'éternel débat, nous avons laissé faire , tous coupables mais pas responsables, tous responsables mais pas coupables, soufflez dans les tuyaux et vous entendrez le bruit des bottes se lever pour le banquet.
Je ne sais pas, serais je boulangère pour sauver nos enfants
car nul doute, nous les avons fait ensemble.
Nos enfants dans les ventres , ventres dans les têtes de douleur.
Les morts sont là et nous regardent , ils se marrent , ils pleurent doucement, ils ont encore froids et peurs, ils se serrent de terreur, les bottes seront là de nouveau à leurs portes et aux nôtres.
Alors anne écrit...
Il faut s'occuper des vivants parce qu'après nous devrons nous occuper des morts dont sans aucun doute nous ferons partis, d'une manière ou d'une autre, chaque jour chaque nuit un peu plus de nous en eux, d'eux en nous, d'un mur à un autre.
Nous occuper des uns et des autres au grand siècle de la merveilleuse et opportune discrète toussotante communication à laquelle je ne crois pas une seconde, nous occuper des uns des autres sans nous confondre de merci, nous fondre de simagrées, démonstrations sourires émerveillés mon cul!
Avant d'encombrer les cimetières, soyons vivants , putain , putain à casque d'or.
On peut se tromper dans les termes et les mots, qui ne s'est jamais trompé?
Mais pas dans le geste.
Si le geste agonise alors il faut le réinventer sans cesse.
Je m'en cogne
comme un gosse
des histoires d'ivrogne,
trancheurs de têtes
pieds sur la table en bottes
plumes en dents plumeau casquette
ventrée de poésie
gloire eulalie
gloire au pendule
gloire aux chemises des sociétés de poésie."
Marie Broor Machu dans: "Les contes de Schanaty"
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