\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\\{#########################
"Bienvenue à « l’école du diable ». À Ploërmel, dans le Morbihan, le premier lycée public vient enfin d’ouvrir… après une lutte de cinq décennies mené par les piliers de l’enseignement catholique dans la ville. À Mona Ozouf, 220 élèves de seconde et de première ont effectué leur première rentrée, le 4 septembre. Jusqu’ici, l’offre scolaire dans la ville était uniquement privée ; un monopole étonnant pour une ville de 10 000 habitants.
« Les résistances ont été éprouvantes. C’était devenu un casus belli dans la ville. Il y avait une vraie violence psychologique et une lassitude à devoir répéter encore et encore la nécessité d’offrir la possibilité d’un enseignement public dans la ville », se souvient Laurent Fontenelle, à la tête d’un collectif qui milite depuis les années 2000 pour la concrétisation du projet. L’idée d’ouvrir un lycée public date des années 1960 : à l’époque, l’inauguration du lycée public la Brocéliande, à Guer, a été considérée comme suffisante, même si elle contraignait les élèves à une demi-heure ou plus de trajet. Dans les années 1990, quelques parents ont élevé la voix en faveur d’un établissement public mais il a fallu attendre l’élection d’une maire de gauche, Béatrice Le Marre, en 2008 pour relancer le projet. Soit 48 ans après la naissance de l’initiative.
À son arrivée à la mairie, Béatrice Le Marre s’est attachée à faire respecter le principe de laïcité au sein de la commune, en exigeant le retrait d’un crucifix dans la salle des mariages et en apposant la devise de la République dans les bâtiments municipaux. L’ancienne édile a même fait intervenir la préfecture pour que cesse la tenue des conseils municipaux dans le collège privé du Sacré-Cœur. « C’est un territoire où la République a peu de voix de cité. Le catholicisme, il ne faut pas y toucher », nous explique-t-elle. L’existence d’un lycée public relevait, pour elle, autant d’une exigence laïque que d’un combat social. « Nous sommes dans un secteur très ouvrier, où les salaires sont bas et les personnels peu qualifiés. Il y avait un vrai enjeu à offrir la possibilité d’une éducation gratuite. »
C’est sans compter la résistance des deux lycées privés présents sur la commune : le lycée général de la Mennais, et le lycée agricole privé La Touche. Des manifestations sont organisées par les habitants, qui craignaient que l’ouverture d’un établissement public vide les écoles existantes. « C’est devenu très sensible. Des voisines et des amies de toujours se sont mises à vociférer contre moi. Il y a eu de grosses discussions. Politiquement, c’était très dur », se souvient Béatrice Le Marre. Les responsables des deux établissements ont ensuite requis des expertises et contre-expertises pour montrer que la demande était insuffisante ; que le lycée ne serait jamais rempli. « Ils soutenaient que l’ouverture d’un lycée public était superflue. Ils la considéraient comme du gâchis d’argent public », poursuit l’ex-édile.
Une longue histoire du catholicisme
Le projet venait surtout se confronter à l’identité profonde de la commune. Dans le Morbihan, 49% des écoliers sont scolarisés dans l’enseignement catholique. « C’est vrai dans la région Bretagne en général, mais d’autant plus dans le secteur de Ploërmel. C’est l’héritage historique de la ville. Dès 1819, Jean-Marie de La Mennais y a créé la Congrégation des frères de l’instruction chrétienne, qui ont assuré l’éducation des enfant pour toutes les générations qui ont suivi », explique Samuel Gicquel, chercheur en histoire contemporaine à l’Université de Rennes 2. « Pendant très longtemps, il n’y a pas eu de demande pour l’ouverture d’autres établissements. Même après la loi Guizot, les communes du secteur se sont tournés vers les frères pour assurer l’éducation des enfants. Le basculement s’est fait après la fin du XXe siècle avec une prise de distance croissante à l’égard de la religion, et par l’arrivée de nouvelles personnes dans la commune. »
À Ploërmel, l’école de la République n’a pas bonne presse. « Il y a cette idée persistante qu’une bonne école doit proposer un enseignement religieux, poursuit Samuel Gicquel. Mais ces dernières années, cet attachement à l’école catholique a changé de nature. On fait confiance au privé par fidélité culturelle, par mimétisme. On considère que la pédagogie y est meilleure, que la discipline est plus stricte, etc. » Un jour, Béatrice Le Marre a évoqué auprès d’une mère d’élève en difficulté financière la possibilité de l’école publique : « Celle-ci s’est mise à hurler qu’elle ne scolariserait jamais son enfant à « l’école du diable ». En tant que laïque convaincue, je me suis toujours sentie en marge de la ville », soupire-t-elle.
"En grève de la faim depuis 15 jours, Thomas Brail s’est installé dans un platane devant le ministère de la Transition écologique,"
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire