"Tout est calme
Pendant l'hiver
Au soir quand la lampe s'allume
A travers la fenêtre où on la voit courir
Sur le tapis des mains qui dansent
Une ombre au plafond se balance
On parle plus bas pour finir
Au jardin les arbres sont morts
Le feu brille
Et quelqu'un s'endort
Des lumières contre le mur
Sur la terre une feuille glisse
La nuit c'est le nouveau décor
Des drames sans témoin qui se passent dehors"
Pierre Reverdy
"Ce soir je vais partir visiter les nuages,Bernard Dimey
Je n’y suis pas encore mais ça va pas tarder,
Je vois déjà des fleurs tout autour des visages,
Tous les gens qui sont là commenc’nt à m’regarder
Car si je réussis c’est extraordinaire.
Ils ont raison d’attendre, ils seront pas déçus,
Je sens que j’m’arrondis comme une Montgolfière,
Je vais quitter la terre, personn’ me verra plus !
J’ai commencé c’matin aux petites aurores
Avec un muscadet de derrièr’ les fagots
Qui glissait comm’ du v’lours, d’ailleurs j’en rêve encore,
Et deux trois p’tits kirs qu’étaient bien rigolos,
Vers midi je marchais sur des pompes à bascule,
C’est là que j’ai compris que j’allais m’envoler.
C’est un travail très dur… Si t’avanc’s pas tu r’cules,
L’ivresse est un pays où faut pas rigoler !
T’as des gens qui picol’nt sans aucun savoir-faire,
Eh bien, voilà des gars qui s’envol’ront jamais,
Qui cess’ront pas d’ramper, qui quitt’ront jamais terre
Alors que moi je sens que ça va pas tarder,
J’vais survoler Paris comme un ange véritable.
J’aim’rais pouvoir emm’ner tous mes potes avec moi
Mais comm’ils s’fout’ de moi pasque j’mont’ sur la table
J’vais m’envoler tout seul et j’les emmèn’rai pas !
Il est huit heur’s du soir, y a douze heur’s que j’travaille,
Je me sens tout léger comme un petit zoizeau.
Me v’là sur le trottoir avec des gens qui braillent,
Je vais prendr’ mon élan… Je serai tell’ment beau
Que tous ces connards-là en auront plein la vue.
Allez hop ! C’est parti !… Non, c’est pas pour ce soir.
Y a vingt ans que j’m’exerce… C’est toujours pein’ perdue.
J’essaye encore demain… Après, j’arrête de boire."
LETTRE A DES AMIS PERDUS
"Vous étiez là je vous tenais
Comme un miroir entre mes mains
La vague et le soleil de juin
Ont englouti votre visage
Chaque jour je vous ai écrit
Je vous ai fait porter mes pages
Par des ramiers par des enfants
Mais aucun d’eux n’est revenu
Je continue à vous écrire
Tout le mois d’août s’est bien passé
Malgré les obus et les roses
Et j’ai traduit diverses choses
En langue bleue que vous savez
Maintenant j’ai peur de l’automne
Et des soirées d’hiver sans vous
Viendrez-vous pas au rendez-vous
Que cet ami perdu vous donne
En son pays du temps des loups
Venez donc car je vous appelle
Avec tous les mots d’autrefois
Sous mon épaule il fait bien froid
Et j’ai des trous noirs dans les ailes."
René Guy Cadou
La poésie ne sauve de rien.
Elle n'est juste qu'un pas de côté, une écriture dans la marge,
comme une fragile respiration qui pourtant donne des couleurs à la vie qui s'en allait
vers d'autres pompeux et vulgaires magistères
formatés sur l'écran futile de platitudes pailletées.
La poésie sauve de tout.
comme un vaccin universel
aux effets secondaires aussi discrets que fulgurants.
Elle vous épie et vous traverse de ses ondes propices
aux ptits bonheurs de l'instant;
et...
dans la perspective d'un soir marécageux,
elle vous caresse de ses doigts de chaume,
et vous susurre des épîtres d'amour,
des prières sans dieux (odieux)
comme une ode fragile et essentielle
à tous les maillons de l'espèce
et un pied de nez aux donneurs de leçons, faux clowns en chambres et patentés
qui remplissent l'espace de leur vide cravaté.
et disparaissent aussi vite dans les fanges de l'Histoire comme une fiente nauséabonde noyée à dache
par des vents de terre.
La poésie n'a pas de morale ni de propriétaire;
elle appartient à tous
et chacun peut s'en saisir ou non.
C'est selon...
"A l'école de la poésie on n'apprend pas, on se bat !"
Léo Ferré
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Aveyron mon (autre) amour
https://douze.noblogs.org/
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découvert: "Dans l'herbe tendre"
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