vendredi 21 mars 2014

vous avez dit autonome?


photo: Marc Racineux


VOUS AVEZ DIT AUTONOME?

"Il me regarde par-dessus ses lunettes rondes, les bras croisés sur son ventre proéminent et me lance ce sourire prometteur que je connais si bien.
Prometteur de volonté à toute épreuve et de grands projets d'avenir. Parce que lui, il est comme ça, il veut devenir "autonome, raisonnable, instruit et avoir une vie normale" . Enfin, je ne sais pas si c'est bien lui qui le veut, mais il le répète inlassablement, la voix monocorde et pâteuse: "C'est pour mon bien", "Je vais devenir raisonnable" ou encore "Je deviens autonome, hein?"
Si on recule pour tenter d'échapper à la redondance du discours, il s'approche très près. il croise ensuite les bras, asseyant ainsi son autorité et nous regarde fixement au-dessus de ses lunettes de son air professoral. On ne peut échapper à l'inlassable répétition. il veut "apprendre à lire, à compter, l'alphabet, être jardinier, faire des efforts, apprendre le nom des arbres, des arbustes, des géraniums, des massifs, des fleurs..." . il dit qu'il était violent. Avant. A cause de sa maladie. Grâce aux médicaments "pour son bien", il s'est calmé. il est moins agité. il "fabule moins", m'a t-il dit.
Alors, aujourd'hui, il est fier de montrer qu'il a compris ce que lui avaient rabâché ses éducateurs et son père durant toutes ces années de violence. "Je deviens raisonnable. Je deviens autonome. C'est bien non?"
Au début, il nous fait rire. et puis les jours passent et nous ne rions plus. On s'interroge. Qui est-il? N'est-il à ce point que la copie conforme d'un costume qu'on a voulu lui faire emprunter? L'a-t-on à ce point déshumanisé qu'il en soit devenu un moulin obsessionnel à paroles? N'y a-t-il donc rien derrière le discours répétitif?  Peut-être y avait-il beaucoup de violence avant, tant de violence qu'il a fallu instrumentaliser sa vie. Mais quelle est cette litanie qui l'obsède tant qu'il ne peut répondre lorsqu'on lui demande s'il est fier de lui-même, s'il est heureux, s'il a le sentiment de vivre mieux aujourd'hui qu'avant?
C'est ma collègue, un matin, qui ose le dire: "Lorsqu'il dit qu'il est autonome, j'entends automate". "

-Céline Carpaye- LIEN SOCIAL n°1137



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photo:  Marc Racineux

 Odile nous propose: Le français en langue animale:

 
Pour bien finir la semaine, et aborder la prochaine  avec clairvoyance , en évitant le miroir aux alouettes  :

Le français ? Une langue animale...
«Myope comme une taupe», «rusé comme un renard», «serrés comme des sardines»,etc., les termes empruntés au monde animal ne se retrouvent pas seulement dans les fables de La Fontaine, ils sont partout.

La preuve : que vous soyez fier comme un coq, fort comme un boeuf, têtu comme un âne, malin comme un singe ou simplement un chaud lapin, vous êtes tous, un jour ou l’autre, devenu chèvre pour une caille aux yeux de biche.

Vous arrivez à votre premier rendez-vous fier comme un paon et frais comme un gardon et là, ... pas un chat! Vous faites le pied de grue, vous demandant si cette bécasse vous a réellement posé un lapin.

Il y a anguille sous roche et pourtant le bouc émissaire qui vous a obtenu ce rancard, la tête de linotte avec qui vous êtes copain comme cochon, vous l’a certifié : cette poule a du chien, une vraie panthère ! C’est sûr, vous serez un crapaud mort d’amour.

Mais tout de même, elle vous traite comme un chien. Vous êtes prêt à gueuler comme un putois quand finalement la fine mouche arrive. Bon, vous vous dites que dix minutes de retard, il n’y a pas de quoi casser trois pattes à un canard.

Sauf que la fameuse souris, malgré son cou de cygne et sa crinière de lion est en fait aussi plate qu’une limande, myope comme une taupe, elle souffle comme un phoque et rit comme une baleine. Une vraie peau de vache, quoi ! Et vous, vous êtes fait comme un rat.

Vous roulez des yeux de merlan frit, vous êtes rouge comme une écrevisse, mais vous restez muet comme une carpe. Elle essaie bien de vous tirer les vers du nez, mais vous sautez du coq à l’âne et finissez par noyer le poisson. Vous avez le cafard, l’envie vous prend de pleurer comme un veau (ou de verser des larmes de crocodile, c’est selon).

Vous finissez par prendre le taureau par les cornes et vous inventer une fièvre de cheval qui vous permet de filer comme un lièvre. C’est pas que vous êtes une poule mouillée, vous ne voulez pas être le dindon de la farce. Vous avez beau être doux comme un agneau sous vos airs d’ours mal léché, faut pas vous prendre pour un pigeon car vous pourriez devenir le loup dans la bergerie.

Et puis, ç’aurait servi à quoi de se regarder comme des chiens de faïence. Après tout, revenons à nos moutons : vous avez maintenant une faim de loup, l’envie de dormir comme un loir et surtout vous avez d’autres chats à fouetter."
Billet d’humour de Jean d’Ormesson


photo: Marc Racineux






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Dans le cadre du festival HANDICLAP  l'E.P.M.S. (établissement public médico social) le Littoral de Saint-Brévin les Pins organise jusqu'au vendredi 28 mars une exposition sur le thème des sens (oeuvres artistiques et techniques de 80 résidents).
 Cette exposition est visible à "L'espace des Roches" avenue Jules Verne.


 

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 OYE  OH YEAH!

En raison de la loi sur l'information en période d'élections, aucun commentaire ou article concernant  les élections municipales ne seront publiés sur ce blogounet à partir de ce vendredi minuit et jusqu'à dimanche 20h
-Merci de votre aimable  compréhension-

2 commentaires:

  1. Probablement que ce discours policé, répété à l'envi, est un paravent, un cache-misère mais si toutes les solutions ont été essayées pour rendre cet homme moins malheureux, que dire ?
    Le handicap mental est une peste dont notre société se méfie au lieu de le comprendre. Le seul regard à porter sur un handicapé devrait être un regard humain et nous en sommes loin. J'ai reçu dans mon atelier d'art thérapie, et pendant 8 années, des personnes âgées atteintes de la maladie d'Alzheimer . Certains visiteurs refusaient de saluer ces gens, refusaient de leur parler, de leur serrer la main, de peur d'attraper cette maladie ! J'ai passé beaucoup de temps à expliquer qu'ils ne craignaient rien, auprès de beaucoup, en vain, mais j'ai fait changer le regard de quelques uns sur ces personnes si attachantes.

    Bien amicalement.

    Roger

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  2. tout ce qui nous dérange nous fait peur
    tout ce qui sort de nos habitudes, certitudes, nous fait peur...
    Et pourtant "l'autre" qui nous semble si loin de nous, il nous ressemble tellement et c'est ptêt cela qui nous est insupportable, parce qu'il est juste notre miroir et aussi notre part d'ombre

    merci beaucoup Roger pour ton commentaire
    belle journée
    jj

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