envoi Philippe- à lire sur: A.B.P.
Monsieur le Ministre de l'Intérieur,
"Je vous ai entendu commenter dès samedi soir les événements en marge de la manifestation contre l'aéroport de Notre Dame des Landes et vos propos appellent de ma part quelques réactions et aussi plusieurs questions.
Sur les chiffres d'abord : vous avez parlé de 1.000 casseurs et de 20.000 manifestants dont vous avez dit qu'il fallait les différencier des premiers. Je crois décidément que vos services ont un problème avec le calcul car nous étions beaucoup plus de manifestants et il y avait beaucoup moins de casseurs : disons qu'on pourrait diviser le premier chiffre et multiplier le second par deux au moins pour approcher de la vérité. Mais dans cette affaire d'aéroport, la vérité est décidément malmenée depuis longtemps…
Sur les fameux casseurs : je vous avoue que j'ai été très surprise de comprendre que vos services les connaissaient visiblement bien (vous avez donné des précisions sur leur origine, leur positionnement politique) et même qu'ils savaient ce qui allait se passer. Depuis deux jours, les bruits couraient sur des incidents à venir ; les avocats savaient qu'ils risquaient d'être réquisitionnés pour de nombreuses gardes à vue. Samedi matin, au moment où nous étions avec les tracteurs à l'aéroport de Nantes-Atlantique, les policiers présents nous ont spontanément parlé des blacks blocs, en nous disant qu'ils allaient gâcher notre manifestation.
Je m'étonne donc que les forces de l'ordre n'aient pas été au fond plus efficaces puisque cela aurait dû être leur mission, n'est-ce pas ? Puisque l'on sait désormais interdire un spectacle avant même qu'il n'ait lieu, et puisque nous n'avons pas sur la ZAD 1.000 casseurs ni blacks blocs, pourquoi ne les avez-vous pas fait arrêter avant leur arrivée ? J'imagine que s'ils sont si dangereux, vous avez certainement des preuves et même des faits graves à leur reprocher ?
Mais peut-être préfériez-vous les arrêter en flagrant délit ? Est-ce pour cela que vous n'avez pas fait protéger l'agence Vinci, située au tout début du parcours de la manifestation, pas plus que des engins de chantier Vinci aussi (car Vinci est partout vous le savez, immobilier, parkings, aéroports…) dont vous saviez qu'ils seraient forcément des cibles ? Est-ce pour cela que la Préfecture n'a autorisé qu'un parcours ridiculement petit, jamais vu jusque là ? Est-ce pour cela que les échauffourées localisées dans un périmètre pourtant restreint ont duré plusieurs heures ? Et au bout du compte combien y a-t-il eu d'interpellations ? Une douzaine seulement…C'est assez curieux et à vrai dire difficilement compréhensible alors que les moyens déployés étaient impressionnants, en hommes et en matériel anti-émeute, alors que la fermeture du centre ville était inédite, alors qu'il y avait vraisemblablement des hommes à vous des deux côtés.
Évidemment les images de la guérilla urbaine dont vous avez parlé seront reprises à l'envi plus que celles du char-triton, des 520 tracteurs présents ou des nombreuses familles manifestant paisiblement. Évidemment, cela permettra d'occulter une fois encore le fond du dossier, évidemment le choeur des partisans de l'aéroport poussera des cris horrifiés en rejetant la responsabilité sur les organisateurs de la manifestation.
Organisateurs qui ont pourtant tenté d'éviter l'affrontement en interposant des tracteurs entre l'imposant mur de fer érigé et ceux qui voulaient effectivement en découdre.
Organisateurs dont le métier n'est pas d'assurer l'ordre, vous en conviendrez et à qui il serait malvenu de demander de faire mieux que vous…
Organisateurs particulièrement choqués, en tout cas, par les propos du Préfet de Loire-Atlantique qui n'a pas hésité à affirmer que nous, opposants historiques, devions cesser d'être la vitrine légale d'un mouvement armé. Je me suis pincée pour y croire… encore un peu de temps et nous finirons nous-mêmes par être tenus pour de dangereux terroristes alors que nous avons participé loyalement au débat public, et à toutes les commissions mises en place. Débat déloyal puisqu'il y a une vérité officielle intangible même quand elle est contraire aux faits, aux chiffres et à la réalité.
Le Premier ministre ne reconnaît la validité que de la commission du dialogue à qui il avait donné mission de valider à nouveau le projet, mais refuse de regarder les conclusions accablantes de la commission des experts scientifiques au regard de la loi sur l'eau. Comment croire encore à la parole de l'État ?
En réalité, Monsieur le ministre, tout cela est très lisible et vieux comme le pouvoir.
Pour discréditer notre combat, et tenter de retourner l'opinion publique qui nous est aujourd'hui favorable, on fera appel à la peur du désordre, on utilisera l'image, déplorable je vous l'accorde, des dégradations commises par les méchants casseurs et on justifiera ainsi une nouvelle opération policière pour aller enfin nettoyer la ZAD de ses délinquants dangereux, en même temps que de ses tritons et de ses paysans. Il faudra mettre les moyens (ils sont mille, ne l'oublions pas, et les tritons innombrables…) mais vous y êtes peut-être prêts pour que force reste à la loi ? Permettez-moi de vous le déconseiller car pour que nous, citoyens, acceptions désormais cette clef de voûte théorique de la société, (la seule violence légitime est celle de l'État), il faudrait que l'État soit irréprochable, que la loi soit juste et que ses représentants soient dignes du mandat que nous leur avons confié. Vous avez compris, je pense, que ce n'est pas le cas depuis longtemps.
Depuis deux jours, j'ai lu et entendu que le centre ville de Nantes était saccagé, qu'un commissariat avait été dévasté, qu'il faudrait du temps pour panser les plaies de la ville, que les dégâts ne pouvaient pas encore être chiffrés, autant dire que c'était l'apocalypse. Les mots eux-mêmes sont visiblement sens dessus dessous...
Puis-je vous suggérer de venir à Nantes pour juger de la situation ? Aujourd'hui dimanche, flottait certes une petite odeur de gaz lacrymogène, mais le tramway roulait et les Nantais flânaient. Je ne nie pas les poubelles brûlées, les pavés arrachés, les vitrines brisées et les murs maculés dans le secteur des affrontements. Je déplore ce vandalisme d'autant plus que nous dénonçons par ailleurs le gaspillage d'argent public qu'induirait le transfert de l'aéroport !
Mais je voudrais aussi vous rappeler que samedi des personnes âgées, des enfants ont été noyés sous les lacrymogènes. Et qu'un jeune manifestant a perdu un oeil à cause d'un éclat de grenade assourdissante. Ce n'était pas un casseur. Et cela nous rappelle le même malheur survenu déjà à Nantes, à cause d'un tir tendu de flash ball lors d'une manifestation sans violence devant le Rectorat. Les aubettes seront reconstruites, cela fera même monter le P.I.B mais ce jeune restera, lui, marqué à jamais. Cela m'interroge sur la manière dont les forces de l'ordre utilisent leurs armes et me scandalise davantage que la casse matérielle. Et demain, si le gouvernement persistait dans son projet d'aéroport, la destruction du bocage de Notre Dame des Landes et de la vie qu'il abrite serait elle aussi irréversible.
Il faut arrêter un projet désormais dans l'impasse et régler le problème en prenant la seule décision raisonnable : respecter la loi sur l'eau, améliorer l'aéroport de Nantes-Atlantique et rendre sa sérénité à Notre Dame des Landes pour que la ZAD redevienne une campagne où vivre et travailler. Vous pourrez ainsi, Monsieur le ministre, vous consacrer aux blacks blocs si vous le jugez indispensable.
Dans l'espoir de votre réponse, je vous assure de mes salutations les plus distinguées,"
Françoise Verchère, Conseillère générale de Loire-Atlantique
illustration source Toile
Sur les forums:
QUESTION DE STRATEGIE
"C'est d'abord une
mobilisation historique, la plus grosse depuis le début du
mouvement, 520 tracteurs, peut-être 50 à 60 000 personnes (c'est
historique que le préfet en annonce 20 000, il avait dit 12 000 pour
la chaîne humaine...), des cars venus de toute la France, comme
toujours une inventivité exceptionnelle dans la diversité et... au
final l'unique passage en boucle des 'incidents' dans les médias. Il
est urgent que des citoyens témoignent et s'expriment sur ce qu'ils
ont vu et entendus.
Les choses n'ont pas
dégénéré 'en fin de manif' mais dès 15 heures, la manifestation
s'est retrouvée bloquée, égarée... ne sachant plus ou aller en
particulier des militants se sont trouvés coincés contre les
grilles situées au bas du Cours des 50 otages. J'ai moi-même, avec
peu de personnes, longuement (et sans grand succès) essayé
d'indiquer aux manifestants qu'il fallait tourner à gauche, et ne
pas venir se faire bloquer contre les grilles des policiers. Les
lacrymos ont commencé très vite... Des jeunes sont restés traîner,
(ah ce rite initiatique des premières lacrymos...), d'autres y
compris adultes 'voulaient voir', et contribuaient au blocage. Une
fois la manif coupée en deux, des tas de gens étaient complètement
perdus ne sachant plus ou se diriger, avant finalement que des
tracteurs ouvrent la voie en suivant la ligne de bus.
Comme l'ensemble du
mouvement, il y a une réelle diversité des acteurs/actrices dans ce
que la presse présente à longueur de colonnes comme les exactions
des ZADistes.
Il est d'abord certain
(et totalement inutile de nier) que des 'éléments extérieurs' aux
acteurs du mouvement local contre l'aéroport sont venus à Nantes
dans leur habituelle 'stratégie du coucou' : ils viennent
plaquer leur choix de mode d'action violente sur des événements ou
manifestations extérieures à leur idéologie, sans être pour RIEN
dans l'extraordinaire mobilisation (qui a réuni des milliers de
personnes pendant plusieurs semaines, - toutes organisations de la
Coordination des opposants au projet d'aéroport, certains groupes
d'habitants sur la ZAD , des dizaines de comités de soutien...). La
lutte de Notre Dame des Landes (d'autres aussi) est leur bac à
sable, pour jouer à être les radicaux, les seuls vrais purs d'un
combat réputé anti-capitaliste. Attitude fascisante, mépris de la
mise en danger éventuelle de familles et de jeunes enfants (pire,
ils les utilisent avec cynisme), sarcasmes envers des militant-e-s
qui tentent de s'opposer à leurs exactions. Leur opposition à
l'Etat va leur faire faire indistinctement des dégradations de tout
ce qui peut le représenter, pêle même des bombages sur l'ancien
tribunal (çà c'est pas grave), ou le saccage d'éléments vitaux
pour les transports publics (trains, aubettes et matériel du
tram...). Il y avait des personnes tout en noir, cagoulées, dont les
'uniformes' rutilants n'avaient pas la moindre trace de boue, sortant
de leurs sacs à dos des marteaux pour détruire les aubettes de
bus... Ils peuvent attirer abuser des jeunes (ou moins jeunes...) en
réelle détresse sociale, psychologique, sanitaire...
Qu'on les surnomme Black
Bloc, ou autrement, ceux-là, qui sont bien connus, auraient pu faire
l'objet de l'attention d'une police républicaine qui chercherait
vraiment à protéger la sécurité tant des participants à la
manifestation que des personnes présentes par hasard sur les lieux
(sécurisation des parcours en évitant la circulation automobile,
attention aux personnes en terrasse de café...). Non seulement il
n'en n'a rien été, mais la police compte sur eux pour que les
choses dégénèrent, en plus des nombreux policiers infiltrés dont
on n'a pas vraiment vu le caractère modérateur (cherchez pas, çà
voudrait être de l'humour, je suis fatiguée).
Car il est bien certain
que la stratégie du préfet, en interdisant le parcours de la manif
par le cours des 50 otages en particulier, a été de créer les
problèmes qu'il était censé résoudre... Des décisions demeurent
incompréhensibles aux personnes les plus modérées (par exemple
laisser longuement brûler des engins de chantiers, isolés, et qui,
sans doute, auraient pu être éteints quasi tout de suite...).
D'autres, y compris parmi
des habitants de la zad, ont cru pouvoir, par une manifestation de
leur 'détermination', créer les conditions qui feraient peur aux
décideurs sur ce qui se passerait s'ils attaquent la zone :
bombages, fusées contre le commissariat et la vitrine de Vinci...
Loin de de se rendre compte qu'ils ont ainsi offert un boulevard au
préfet pour une opération 'César2' où ils risquent de perdre une
partie de l'extraordinaire soutien populaire qui avait précipité en
masse des citoyens de la région, des paysans... vers la foret de
Rohanne ou la Chat Teigne à l'automne 2012. Illusion grave, dont
nous aurons à subir collectivement les conséquences. Certes, 'nous
serons là', mais peut-être moins nombreux.
J'ai rejoint le square
Daviais, arrivée de la manif, un peu après le début des prises de
parole
Le début de la manif n'a
commencé à voir les lancers de lacrymos, cartouches
assourdissantes, canons à eau, que bien après son arrivée.
Remontée dans le car
vers St-Nazaire vers 18 heures, nous avons attendu longuement le
passage de tracteurs prenant la direction de l'ouest et transportant
des dizaines de personnes (zadistes???) qui rentraient
tranquillement, sans participer aux échauffourées.
Nous n'avons pas fini les
analyses et la recherche de solutions pour tenter de démonter à
l'avenir des pièges complexes... soigneusement tendus... Il est
difficile de se dire (après coup) qu'il aurait fallu être là ou
là... Inutile de se flageller, la responsabilité des problèmes
n'est pas du côté des organisateurs, même si je ne suis sans doute
pas la seule à regretter que nous n'ayons pu faire mieux pour garder
à l'ensemble de la manifestation, et pas seulement à son début,
son caractère populaire, intergénérationnel, festif...."
La lutte continue !
"La rétention de l'information est une forme de constipation du savoir."
-Théophraste Renaudot-
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Le rigodon du mardi
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"Puisque l’heure est à la mobilisation générale pour protéger la petite enfance contre toutes les menaces, des mauvaises nounous mal vêtues aux mauvaises lectures et aux images toxiques incitant à la débauche ou, pire, au trouble dans le genre, et puisque d’authentiques éducateurs, adultes et responsables, nous ont montré la voie en initiant un courageux combat pour l’interdiction d’un film dangereux pour la santé, il nous a paru de notre devoir le plus impérieux de rejoindre le mouvement, et même de l’intensifier.../..."lire la suite chez "Le Collectif- Les mots sont importants"
« J'ai une pleine étagère de Bibi Fricotin ! J'y retrouve la saveur d'une adolescence tourmentée, durant laquelle j'étais fan de ce personnage. Ce gars-là a des solutions à tous les problèmes. Quelle que soit la situation, il s'en sort ! Je suis totalement immergé, au quotidien, dans l'univers « sérieux », d'une très grande complexité et marqué par l'extrême urgence de la crise que nous vivons. L'homme est individuellement doué et collectivement crétin. C'est une barrière au bonheur. Bibi Fricotin, avec sa candeur intelligente et vive, m'offre une échappatoire vers la simplicité et une forme d'innocence face à la gravité. Même si le héros majeur de ma vie demeure Socrate... » Pierre Rabhi
lu chez: CAILLOUX DANS L'BROUILL'ART
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