samedi 21 juillet 2012

je est un autre





JE
est une gageure
majuscule,
un ersatz du moi et des années suivantes.

JE
trinque à la santé de son ombre
qui rode à toute heure
et en toute circonstance
même et surtout quand elle est invisible.

JE est à la merci des flots qui l'entourent,
des courants contraires  et des récifs à peine présentables
même sous le halo des phares les plus en vogue.

JE est une île
minusculement immense
où JE se perd
où JE s'avance
à pieds joints,
à reculons,
à colin maillard,
à qui perd gagne,
à ses souhaits,
à ses amours,
à ses remords 
à ses regrets...

JE est une blessure toujours ouverte au sel de la vie..

JE est un spectacle permanent
ou JE remplit tous les rôles et les conditions
sine qua non.

JE prend le relais.
JE vide son sac
et
entre les deux,
à flots
JE n'y comprend rien 
et
son coeur s'en  balance.

JE est l'Unique.


















-Chanson de l'étranger-

"Je suis à la recherche
 d'un homme que je ne connais pas,
qui ne fut tant moi-même
que depuis que je le cherche;
A-t-il mes yeux, mes mains
et toutes ces pensées pareilles
aux épaves de ce temps?
Saison des mille naufrages,
la mer cesse d'être la mer
devenue l'eau glacée des tombes.
Mais plus loin qui sait plus loin?
une fillette chante à reculons
et règne la nuit sur les arbres,
bergère au milieu des moutons;
Arrachez la soif au grain de sel
qu'aucune boisson ne désaltère;
Avec les pierres, un monde se ronge
d'être,comme moi, de nulle part."

-Edmond Jabès-





A FORCE DE M'ECRIRE...

"A force de m'écrire
je me découvre un peu
je recherche l'Autre

J'aperçois au loin
la femme que j'ai été
Je discerne ses gestes
Je glisse sur ses défauts
Je pénètre à l'intérieur
d'une conscience évanouie
J'explore son regard 
comme ses nuits

Je dépiste et dénude un ciel
sans réponse et sans voix
Je parcours d'autres domaines
J'invente mon langage
et m'évade en Poésie

Retombée sur ma Terre
j'y répète à voix basse
inventions et souvenirs

A force de m'écrire
je me découvre un peu
et je retrouve l'autre."

-Andrée Chedid-




IL FAUT RESTER ICI...

"Il faut rester ici,
 les genoux fleuris au beau milieu des ruines
et de la poussière
De douceur les enfants ont payé
(de violence ne parlons guère),
de douceur les enfants des grandes ville de cendre
il faut accrocher aux arbres et aux jambes
des messagers d'eau et de grandeur...


                       Voici la petite chaise de ton enfance
où tes parents gravaient la hausse de ta solitude;


Tu es restée debout avec le ciel
au fond de toi comme un bouquet de veines;
il n'y a rien au fond de toi
que cette arborescence fauve:
la même que celle des rues,
que celle des affiches de cinéma.


                          C'est un dimanche après-midi;
je cours sous les enseignes pendant que la pluie se charge
de me ranger dans les tiroirs de la nuit.


                        Pour une fois j'ai tout compris
j'ai compris que les portes existent ou n'existent pas.


Je vais librement par ce labyrinthe.


J'emporte la petite chaise de mon enfance
où mes parents gravaient la hausse de la solitude."

-Claire Légat-












-Illustrations source: Toile
-Les poèmes entre guillemets sont extraits de: "Je est un autre" Editions Seghers-

4 commentaires:

  1. Et quand JE rencontre TU...
    N'est pas le reflet du jeu...
    Le jeu de la vie qui passe et tue l'avant...

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  2. En avant-
    JE
    au risque de se retrouver hors jeu...
    mais finalement si j'en crois Brigitte Fontaine et son compère Areski

    "Nous sommes tous nous
    Vive nous
    Nous sommes tous vous
    Vivons-nous

    Fions-nous à nous
    Louons-nous
    Donnons-nous à nous
    Chantons-nous .../..."

    Belle journée à vous!

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  3. Tu nous a composé un magnifique billet, J.J.

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