jeudi 1 mars 2012

allez dire à la ville



"Terre dure de dunes et de pluies
c’est ici que je loge
cherchez, vous ne me trouverez pas
c’est ici, c’est ici que les lézards
réinventent les menhirs
c’est ici que je m’invente
j’ai l’âge des légendes
j’ai deux mille ans
vous ne pouvez pas me connaître
je demeure dans la voix des bardes
O rebelles, mes frères
dans les mares les méduses assassinent les algues
on ne s’invente jamais qu’au fond des querelles
Allez dire à la ville
que je ne reviendrai pas
dans mes racines je demeure
Allez dire à la ville
qu’à Raguenès et Kersidan
la mer conteste la rive
que les chardons accrochent la chair des enfants
que l’auroch bleu des marées
défonce le front des brandes.../...

 .../...Allez dire à la ville
que c’est ici que je perdure
roulé aux temps anciens
des misaines et des haubans
Allez dire à la ville
que je ne reviendrai pas..../...



.../...Poètes et forbans ont même masure
les chaumes sont pleins de trésors et de rats
on ne reçoit ici que ceux qui sont en règle
avec leur âme sans l’être avec la loi
les amis des grands vents
et les oiseaux perdus
Allez dire à la ville
que je ne reviendrai pas
Terre dure de dunes et de pluies
pierres levées sur l’épiphanie des maïs
chemins tordus comme des croix
Cornouaille
tous les chemins vont à la mer
entre les songes des tamaris
les paradis gisent au large
Aven
Eden
ria des passereaux
on met le cap sur la lampe des auberges
les soirs sont bleus sur les ardoises de Kerdruc
O pays du sel et du lait
Allez dire à la ville
que c’en est fini
je ne reviendrai pas
Le Verbe s’est fait voile et varech
bruyère et chapelle
rivage des Gaëls
en toi, je demeure.../...

.../...Allez dire à la ville
Je ne reviendrai pas."



Xavier Grall-"Allez dire à la ville" extrait de: La sône des pluies et des tombes
- Oeuvre poétique-Editions Rougerie



photos: Patrick Lecouffe



3 commentaires:

  1. MAGIQUE ! j'adore la force de ce verbe, la beauté de ces images, tout pour nous faire un billet des plus réussis !

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  2. A défaut d'autre moyen je te-vous communique ce texte en commentaire, quitte à ce qu'il soit publié autrement sur "Couleurs d'Aencre" !
    La poésie d'un sourire, le sourire de la poésie... :

    Un grand calendrier mural d'Amnesty International va me donner à voir, chaque mois, une très belle photo d'enfant du vaste monde... enfin, surtout d'enfants soumis à de très pénibles conditions de vie, mais d'abord, naturellement gais, souriants... et merci à A.I. de ne pas ici avoir versé dans le misérabilisme, mais d'insister sur la jeunesse et le sourire du monde humain si maltraité !
    Il m'arrive – comme tout le monde – de « serrer les dents dans l'adversité », au minimum, et j'ai au moins tenté, toujours, de ne pas sombrer dans la déprime, et pire, dans le repli, voire la haine du voisin, fût-il mon patron ou mon banquier, un bureaucrate ou un flic, etc.
    Juste un haussement d'épaules, une brève engueulade s'il le faut, ou une épreuve de subir un coup de matraque, physique sur la tête, ou sur le portefeuille ; voire sur le cœur, en cas de conflits en amours ou en amitiés : bref la vie !...
    Une vie chaotique parmi d'autres, qui me met facilement en empathie avec ces autres, en particulier lorsque pleuvent les bombes (à Homs en ce moment, après d'innombrables terreurs meurtrières dont j'ai connu certaines dès l'enfance). Mais voilà...

    Voilà la force du sourire de l'enfant, la force du sourire de l'adulte qui n'a pas renié la naïveté de son enfance (même s'il a bien fallu la quitter pour « galérer »...), voilà la poésie d'un sourire !
    A la boulangerie, il m'arrive par exemple de répondre à la jolie employée qui me dit d'un ton machinal (plus sourire commercial) : « Et avec ça ? », de lui répondre, donc, gentiment : «avec un sourire gratuit» !... et il m'arrive de recevoir un bref éclat de rire sincère !

    La spontanéité du sourire (même celui du si discret regard souriant), pour rien, pour moins qu'un mot entre passants anonymes m'a depuis longtemps fasciné – comme la poésie. Parfois seulement, hélas, car, même sans le métro où se ruer il arrive - en bagnole c'est pire – de « foncer dans le tas » en tout égoïsme du « je vais être en retard », religion du modernisme...

    *

    La poésie a le temps. Elle vient du fin fond des âges. Sans doute du sourire, avant même que n'existe la parole, puis, bien plus tard, l'écriture... Toujours intimement liée à la musique et au graphisme, elle tente d'exprimer « le souffle », la liberté, la joie de vivre, le sourire... ou bien elle sombre dans l'académisme de versificateurs-pompiers, ces pollueurs de la véritable poésie...

    La vraie poésie est plus que belle et utile, elle est le sourire de la vie !

    « le bruissement des feuilles de peupliers dans le vent m'est poésie »
    a dit quelqu'un, je ne sais qui, mais en tout cas moi, ici...
    Et sourire à vous !

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  3. merci Anne pour tes encouragements
    et merci Rem pour le message dans tous les sens du terme

    ;-)

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