".../...Tout à l'heure je suis allé marcher dans le couloir, Grosse-poitrine faisait un discours...Ils ferment des services...Les autres écoutaient en silence...Ils suppriment des postes par milliers...Il y avait le type qui m'a fait les radios...c'est plus possible...Le docteur qui m'a ausculté le premier est arrivé. Grosse-poitrine s'est arrêtée, les autres ont commencé à parler; Une cinquante tout en os, blouse amidonnée, s'est avancée...Y a plus de verres, plus de cuillères...elle s'est reculée...Plus de taies d'oreillers, plus d'alèses...et est rentrée dans le rang, le visage écarlate. Les autres hésitaient encore, une voix a jailli du fond...Hier ma fille m'a dit, Maman...Les autres se sont écartées, c'était l'Arabe aux cheveux noirs...M'a dit maman, comment on va faire pour payer les factures...L'Arabe qui fait les lits le matin et nous apporte les repas...Les factures, à cinq ans, vous vous rendez compte?...Là, elles ont commencé à parler toutes en même temps, des salaires, qui ne suffisaient plus, des malades qui étaient sacrifiés, des traites pour la maison, des lits dans le couloir, de tout ce qui manquait. une voix s'est élevée au-dessus des autres, celle de la rouquine qui fait les prises de sang.
-Ils te répondront que c'est pas le moment.
-C'est jamais le moment!
L'infirmière du matin, celle qui me prend la tension et ne parle jamais, a levé la main, les autres se sont tues. Elle a respiré un bon coup, elle était au bord des larmes...
De l'argent y en a toujours pour ceux qui en ont, jamais pour nous et pour les malades. c'est pas à nous de payer leur crise...
Un silence à faire craquer les murs.
Je suis parti sur la pointe des pieds.
La timide de tout à l'heure vient de me prendre le pouls, elle avait les joues toutes rouges...ça m'était jamais arrivé de parler comme ça. Maintenant je vais y aller aux réunions...il faut dire ce qui se passe, chez nous, en bas.
42 c'est bien vous faites du sport?...Elle est allé rejoindre les autres dans le couloir...Je vais parler maintenant.Je vais parler.../..."Extrait de "Siècle d'enfer" de Frédéric Castaing-Editions "Au Diable Vauvert"
Oui, c'est le mauvais siècle. Et c'est déchirant d'assister, impuissant, aux fins de grève, pour cause de frigos vides et de salaires amputés d'autant de jours passés à crier. Enlever le bâillon, ici , sur vos pages, c'est déjà pas mal. Bonjour Jean.
RépondreSupprimerLongue déchéance d'une société portée à son déclin... où se battre pour défendre ses droits à bouffer sinon royalement au moins dignement est presque interprété comme une offense... où crever sur la chaussée ou au pied de son escalier ne fera pas relever la tête des imbéciles et bien-pensants... Alors simple question récurrente : Sommes-nous à ce point bouffé par notre égo, pour ne plus avoir regard ni tendresse pour autrui?
RépondreSupprimerMerci pour vos commentaires.
RépondreSupprimerJe crois bien que cette histoire à la "pousse toi que je m'y mette" entre les Hommes, est malheureusement vieille comme le monde mais...tout autant que celle aussi de la main tendue et du désir de paix. Ce sont les deux hémisphères en perpétuelle lutte de pouvoir de notre ptit bonhomme de chemin, de passage...
:-)
Alors, faut choisir son camps ! l
RépondreSupprimerRogner les dents des loups....!