mercredi 2 septembre 2009

à quelle heure elle passe?

-" qui ça?" demandais-je machinalement et la bouche pleine d'un sandwich jambon beurre et moutarde
-" Ben, l'inspiration tiens! " me dit-elle en regardant le soleil se coucher sur sa mère.
-je jetais un oeil circonspect à l'une puis à l'autre, ce qui en faisait deux au total (j'ai toujours été fort en calcul mental) et haussait les épaules tout en déglutissant un peu bruyamment sans doutes, mais au moins cela prouvait que j'étais capable de faire deux choses en même temps.
-Au bout d'un moment et d'un certain temps, celui qu'il fallait certainement pour réchauffer un canon de bass-pression à la terrasse du libre arbitre, le bar des supporters du sporting club nazairien, je répondis: "j'sais pas"
-"Tu sais pas quoi" fit-elle avec une bouche en forme de O et un regard de chien penaud (à vrai dire pas tant que ça mais c'est pour la rime)
-"Heu! ben...j'sais plus" répondis-je du talc au tac, ce qui eut l'air de la surprendre, comme quoi tout semblait possible pourvu que l'on y pense.
-Nous restâmes un moment ainsi, en silence, économisant nos mots , conscients qu'il nous en restait peu sans doutes mais aussi tellement proches, comme nous ne l'avions jamais été depuis que nous nous étions rencontrés , quatorze minutes auparavant au sortir de la gare, elle à la mode et moi en travaux -
-Il est ainsi des instants forts dans la vie- un peu comme la moutarde de mon sandwich qui arrachait drôlement, soit dit en passant, où la parole n'a plus vraiment de sens puisque l'on est à un autre niveau de communication-non verbalisé-
-"Je ne vous verbalise pas, ça ira pour cette fois" c'est ce que m'avait dit un gendarme brigadier, la semaine d'avant, avec un bon regard plein de sous entendus (et c'est pas donné) , alors que je venais de renverser une demi douzaine de séminaristes imberbes qui traversaient dans les clous sur le remblai de La Baule sous le nez , les ailes et les roues aussi- un peu forcément- de mon quatre quart flambant neuf.
"Franchement
" me dis-je intérieurement en silence, y'a pas de quoi en faire un fromage non plus, un hachis parmentier à la rigueur, sauf que j'en voyais un ou deux bouger encore et là ce n'était plus vraiment possible.
Je ne savais pas pourquoi, il m'était venu ainsi ce souvenir douloureux surtout pour les peintures de mon 28 chevaux et trois pots d'échappement- un devant et deux derrière- alors que je me trouvais attablé en compagnie de cette fille dont je ne savais rien et tellement à la fois-Et là, à l'instant, je reconnais volontiers que ce genre de réflexion c'est peut-être un peu trop profond pour certains dans mon public mais cela me semblait pourtant nécessaire à la bonne marche à suivre de l'histoire.
-A parce qu'il y a une suite? je tournais vivement la tête sur ma droite -la gauche étant en dérangement- pour voir qui avait bien pu rompre ainsi la magie du silence, mais ce n'était que moi finalement et sans que je m'en rende compte qui était sorti de mon fort intérieur puisque c'était tout bonnement l'heure de la promenade.
-"Déjà? "fit-elle en reposant son verre de badoit,
-"Déjà côa?" répondis-je en terminant ma deuxième bouchée de bière et de couenne mêlés!
- "La correspondance!"
-"Je la regardais sans comprendre mais en essayant néanmoins de faire comme si, me rendant compte qu'autant de phrases en si peu de temps ne pouvait que bousculer le fragile édifice de ma construction mentale et perturber par la même une relation épistolaire même si mon chargeur était vide.
-Mais elle ne semblait pas dupe, de Pornichet peut-être?
-"C'est mon car qui arrive"
-"Ah!" répondis-je, ce qui me semblait le plus approprié à l'instant
-"Et toi tu attends le bus aussi?" dit-elle dans un souffle rauque et légèrement aillé
-"Moi?"
-"Ben oui tu vois quelqu'un d'autre? "
- j'apercevais effectivement quelques figurants assis autour de nous, mais je ne fis pas de remarque, ne sachant comment elle allait la prendre, nous nous connaissions si peu finalement...
- "Je...Je suis malade en car" fis-je avec un léger sourire contrit et un peu affecté aussi!
- "Elle se leva sans rien dire, pris sur la chaise libre son sac, en toile de parachute me semblait-il, ce qui me donnait une indication supplémentaire sur sa nature sportive et elle marcha d'un pas alerte et rassuré vers l'autobus Chausson qui venait d'arriver au bout de l'allée, dans un nuage de fumée jaune et un bruit de bébé égorgé.
-"Mais quel est ton nom" lui lançais-je
"Elle lévita, mais me répondit quand même sans se retourner:
-"Mon nom est Bonde, Jeanne Bonde"
-Puis elle continua sa route grimpée sur ses escarpins noirs à talons aiguilles de bien 3
centimètres25, ce qui lui donnait une démarche légèrement chaloupée,
-"Elle grésille du trolley" aurait dit un moine missionnaire de mes connaissances qui avait fait l'Afrique et en connaissait un rayon (voir plus) sur la fesse cachée de l'histoire du monde.
-Je terminais d'une seule traite ma pression qui avait fini -enfin- de se faire mousser , puis je rotais discrètement derrière deux doigts ou trois je ne sais plus, puits je me levais à mon tour (je sais être poli) sans payer parce que je connaissais de Vue le patron, et je m'enfilais en toute bonne foi, l'avenue de la République, du côté des agences d'intérim et des marchands de voiture de location , il fallait rapidement que j'en change, la mienne était décidément trop voyante et en plus j'aimais pas le vert.
Mais ça, à part ma grand-mère, personne n'était au courant et c'était mieux ainsi....

2 commentaires:

  1. Furieusement inspiratrice ta nuit dis donc, j'aime bien ton petit moment entre deux temps, là....

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  2. la nuit est souvent propice aux voyages...
    :-)

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