mardi 3 février 2009

la gamelle



"Oh


comme il est bon de trembler à la lumière du matin


parce que sur la table une poire oubliée la veille au soir est encore vivante


et que sur le carreau de la fenêtre


la griffe de l'arbre pardonne encore une fois


la faim." -frédéric boudet-




A pieds? peut-être ou à cheval !


ce n'est pas la raison


pourquoi le monde va si mal...


Du temps qu'on recueillait encore un peu de grain


sur les pavés


on bousculait en plein hiver des pommes de reinette;


on tenait à l'honneur d'en respirer l'odeur


de l'école jusqu'au moulin.


Mon cheval maintenant se flatte l'encolure


par les chemins les plus incertains.


Et me voici bien mal en point


sur ma monture


parce que je ne sais plus rien de l'école ni du moulin.


...parce que tout ça c'est disparu


dans le lointain


avec le pommes et le vin


avec les murs et les gravures


...avec mes mains qui ne savent plus rien


pas même faucher le foin


pas même couper le pain


entre deux verres de vin pur"-déplacements- poèmes pour quelques temps- serge brindeau-




"je soupçonne que la soupe sonne". C'était le signal. Convenu. Illico, l'apprenti se devait de mettre la table, un peu avant midi. La table à coller, s'entend. Ou bien, il ui fallait, presto, échafauder une cène au petits oignons avec deux tréteaux ou les caisses à outils. Le tout selon les rites en vigueur dans la coterie : d'équerre, d'aplomb et sans un brin de poussière; Ensuite, sela ver les mains au Nuzpas quand le white (prononcer ouite) ne pouvait plus rien aux dures croûtes de minium ou de glycéro...Le Nuzpas : sorte de pudding abrasif tenant à la fois du savon noir et du papier de verre n°4. Il l'utilisait généreusement, plus loin dans mon enfance, en pétrissant mes poings tendus pour un délicieux décrassage. Ô les rudes caresses des apprentissages. la nappe? un torchon griffé US Army : quelques reste de parachute peut-être...Un pain énorme à signer d'une croix malgré tout, à trancher par lui, et surtout à ne jamais retourner "sur le dos" Sacrilège. La suite: son oeuvre à elle, restée à la maison, à son jardin, à ses lessives. Elle l'avait préparé aux aurores ce pique-nique magistral, cette gamelle patronale voire paternaliste; Du potager au fourneau, des légumes en veux-tu en voilà et un lapin trucidé la veille, à la diable, de deux coups de ses ciseaux mal aiguisés, déshabillé en un tournemain et voué à la gibelotte. Communion solennelle au chantier; Repas silencieux ou presque: chacun commente brièvement l'avancée de ses travaux, puis se tait, préférant se régaler ens songeant à son boulot ou à la marche de l'univers, et surtout, en attendant le jeu des mille francs. Solidarité ouvrière : tous ensemble vaincre Lucien Jeunesse et son super-banco! Son regard quand l'un de nous répondait juste. De l'intérêt de bien apprendre à l'école, hein? Oui papa. Oui patron. Et le lapin? il gît, belote et re, et dix de der ! Envoyez, c'est pesé ! Cette bonne humeur suffisait à notre bonheur. Être ensemble, à refaire le monde, à l'embellir de quelques étincelles de couleur. Le soir, à l'arrière de la camionnette Simca, nous regardions défiler la route, insouciants compagnons de l'été finissant. Pourtant quel serait, le lendemain, le menu de la gamelle?"-manger à la gamelle- daniel clérembeaux-

"Apprendre l'alphabet en mangeant sa soupe-Ecrire son nom sur le bord de l'assiette-Ecrire rire épeler peler-Se faire gronder parce qu'on traîne-Alors tout avaler, la soupe, le nom, les mots et jusqu'à sa langue."-nicole laurent-catrice-

ces textes sont extraits du recueil "agape/agape(s)"-anthologie-éditions donner à voir-

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